coVIDE
Pendant le confinement, photographier était devenu plus que jamais une nécessité. Au même titre que courir pour certain, photographier devenait essentiel. Photographier pour garder contact avec le monde, même s'il ressemblait encore à ce monde d'avant dont on nous promettait qu'il ne serait plus.
Après avoir travaillé sur mon quartier à documenter cette période si spéciale, l’opportunité de retrouver une liberté de mouvement s'est présentée en toute fin de confinement. La liberté annoncée, et tant attendue, allait avoir quelques jours d’avance.
La chance de disposer d’une autorisation de sortie professionnelle me permettait de retrouver une partie de cette liberté. Liberté de déplacement, liberté de photographier, de documenter.
Documenter cet événement mondial, cet accident planétaire, peut être d’abords pour soi. Comme pour être sûr de ce que l’on a vécu. Utiliser la photographie pour sa capacité à affirmer, à prouver. Voir de ces yeux et le fixer par la photographie. Constituer une autre mémoire de cet événement. Une mémoire plus large, moins contrainte dans l'espace. Documenter pour que ces photographies soient non seulement un point final à cette expérience contrainte, mais aussi qu’elles en soient la catharsis.
Mais documenter est toujours pour les autres.
Donner à voir. Donner à voir les rues de Paris comme on ne les voit jamais. Et comme très peu de gens les ont vus, puisque nous étions presque tous enfermés dans nos appartements, nos quartiers. Des rues vides ou quasi. Des images qui semblent sortir d’un récit de science-fictions et viennent faire écho à celles des mégalopoles à travers le monde, constituant ainsi une sorte de mémoire externe partager d'un événement vécu par tous. Une mémoire dans laquelle chacun peut venir combler les mêmes lacunes, celles de l'expérimentation sensible de nos cités vidées en apparence.
Témoigner du confinement, de sa fin, comme la promesse que le virus, lui aussi, aura une fin.
coVIDE
During confinement, photography became more of a necessity than ever. Like running for some, photography became essential. Photographing to keep in touch with the world, even if it still resembled the world we were promised would never be again.
After working on my neighborhood to document this very special period, the opportunity to regain freedom of movement presented itself at the very end of confinement. The long-awaited freedom that had been announced was a few days ahead of schedule.
I was lucky enough to have a professional release permit, which allowed me to regain some of this freedom. Freedom of movement, freedom to photograph and document.
Documenting this global event, this planetary accident, can be first and foremost for oneself. As if to be sure of what you've experienced. To use photography for its ability to assert, to prove. See it with your own eyes and fix it in a photograph. To build another memory of this event. A broader memory, less constrained by space. To document, so that these photographs are not only an end to this constrained experience, but also its catharsis.
But documenting is always for others.
Giving a view. To show the streets of Paris as we never see them. And as very few people have ever seen them, since most of us were locked away in our apartments and neighborhoods. Empty streets, or almost. Images that seem to come out of a science-fiction story, echoing those of megacities the world over, constituting a kind of external shared memory of an event experienced by all. A memory in which everyone can fill in the same gaps, those of sensitive experience of our seemingly emptied cities.
Witnessing the confinement, its end, as a promise that the virus, too, will come to an end.