Conquérants de l'inutile
Que l'on soit néophyte ou alpiniste assidu, la question du pourquoi revient sans cesse.
Pourquoi diable aller là où il fait si froid, où le risque de chute est permanent, où la neige, la glace et le rocher tombent en permanence au-dessus des têtes ? Pourquoi prendre des risques et parfois même jouer sa vie pour rien, pendant que d'autres risquent la leur pour de grandes causes, de longs combats, de nobles desseins ?
Si cette question se pose pour l'alpiniste, elle est également vraie pour le photographe qui s'encorde avec ces « conquérants de l'inutile* ». Quid alors de la « photographie de montagne » dans le domaine du photo-journalisme ? Légitimité ? Complexe d'infériorité ? Les discours divers et variés sur l'alpinisme ne retiennent que trop souvent la dimension mortelle de cet « alpe homicide » qui fit vendre des magazines à grand tirage. Le reste du temps, c'est la dimension ludique, le fun, l'adrénaline. Un autre message est pourtant sous-jacent.
A l'heure où la place et la fonction de l'homme dans la nature et dans dans la société civile pose question, l'alpiniste apparaît comme un être bien étrange. C'est un tout petit bonhomme qui agit gratuitement face à une montagne immense. Attiré qu'il est par plus grand que lui.
La mise en perspective est aussi vertigineuse que salvatrice. Le goût de liberté perle sur les lèvres essouflées.
Espérons que ces modestes conquêtes photographiées sauront réveiller la détermination de l'alpiniste qui sommeille en chacun de vous.
* Le titre Conquérants de l'inutile est une formule de l'alpiniste Lionel Terray, dont le livre éponyme est paru en 1961.
Conquerors of the useless
Whether one is a neophyte or an assiduous climber, the question of why comes back endlessly.
Why the hell go where it's so cold, where the risk of falling is permanent, where snow, ice and rock fall constantly above the heads? Why take risks and sometimes even play his life for nothing, while others risk theirs for great causes, long battles, noble designs?
If this question arises for the mountaineer, it is also true for the photographer who is roped to these "conquerors of the useless." What about "mountain photography" in the field of photo journalism? Legitimacy? Inferiority complex ? The diverse and varied discourses on mountaineering all too often retain the deadly dimension of this "homicide alp" which caused generalist magazines to be sold in large numbers. The rest of the time is the playful dimension, the fun, the adrenaline. Yet another message is underlying.
At a time when the place and function of man in nature and in civil society raises questions, the mountaineer appears as a very strange being. It is a tiny little man who acts freely in front of an immense mountain. Attracted that he is by bigger than him.
The perspective is as dizzying as it is saving. The taste of freedom pearls on the lips.
Let us hope that these modest photographed conquests will awaken the determination of the mountaineer who sleeps in each of you.
* The title "Conquerors of the Useless" is a formula of the mountaineer Lionel Terray, whose eponymous book was published in 1961.