VISMAVILLE en CONFINEMENT // AU BALCON // Episode 14
11H, presque au pied de l'immeuble, Marcel arrive, casquette des raiders sur la tête. Bonjour, clac : Photo. Le sweat-shirt est encore assorti à la casquette.
Aujourd'hui je partais avec une envie spécifique : je voulais que les gens me montrent ce qu'ils portaient au pieds au moment de ma venue dans la rue.
Pourquoi ? Et bien voilà : hier soir, lorsque mon homme est rentré du boulot, j'étais à la maison (forcément ceci dit ... Pffff) et j'ai retiré mes baskets d'appartement pour mettre mes chaussons en disant : voilà, la journée est finie. Alors, oui, mon homme m'a regardé étrangement et a haussé les épaules, l'air habitué à mes drôles d'idées.
En effet, depuis le 1er jour du confinement, j'ai pris pour habitude de ne pas rester en chausson. je trouvais que ça me donnait un air malade. Alors j'ai mis cette paire de basket que je ne mettais plus depuis longtemps. Je les chausse le matin dès que je suis habillée, et je les retire le soir avant de m'installer dans le canapé.
Alors je me suis dit que ce serait intéressant de voir ce que mes copains d'immeuble avaient à leur pieds.
Je leur ai demandé, ils se sont exécutés. J'ai expliqué pourquoi... Mais cette action a vite perdu de son intérêt lorsque Liliane, 87 ans, du haut de son 4ème balcon me dit : ça fait 2 jours que je ne vais pas bien, je pleure.
Catherine, le balcon le plus près de Liliane, était partie chercher ses chaussettes de soirée pour me les montrer. A son retour sur le balcon, elle prend la pose pour la photo « chaussette ». Je ne sais même pas si à ce moment là, cette photo est cadrée, exposée correctement ou nette. je n'y arrive pas. Les mots de Liliane font un écho assourdissant dans ma tête : « J E P L E U R E «
Je baisse l'appareil photo et dit à Catherine : « Liliane ne va pas bien, elle me dit qu'elle pleure... »
Catherine... Femme incroyable... se met au bout de son balcon, le plus prêt de Liliane, et engage la conversation avec cette petite dame aux cheveux nuages. Elles s'échangent leurs numéros de téléphone. Catherine propose de l'appeler dans la journée, de lui envoyer des messages. Les voilà discuter entre elles. Ouf, j'ai confié la tristesse de Liliane à Catherine.
Au pied de l'immeuble passe Steeve l'infirmier et l'homme que j'espérais.
Ah oui, je ne vous ai pas dit, hier, sur Facebook, en commentaire sur un post de cette aventure, arrive Jerome. Amis en communs : Renaud Hantson. Jerome est facteur à Issy les Moulineaux. Il est même chef facteur ! Et demain, il fait la tournée dans le quartier !
Et bien à 11H...euh...et 15 min je pense, il arrive ! Jerome est le facteur le plus rock n'roll qu'il m'ait été donné de rencontrer ! Tee-shirt des Satan Jokers, veston en cuir sous l'uniforme de postier, lunettes de soleil de rockeur, bagues têtes de mort. J'adore !
Il m'explique que les tournées sont redistribuées en ce moment, et qu'effectivement, il ne tourne que 3 jours. Mais il y a également moins de courrier. Alors ça va.
Liliane a l'air d'aller un peu mieux. Elle vient également de comprendre que je travaille pour la presse. Elle s'excuse de ne pas l?avoir compris avant et me félicite de faire ça. Et elle comprend aussi que je suis là tous les jours à 11H. Alors elle me promet d'être là demain.
Au bout de l'immeuble, la famille d'Eléonore est là. Les filles me montrent quelques jouets, et notamment un tourniquet de vent (Aaarf, comment ça s?appelle ces machins ...) que son grand père lui a offert. Eléonore m'explique aussi que les grands parents viennent tous les jours à l'endroit où je me trouve pour faire coucou à leurs petites filles.
En repartant, je croise le mari de Maria avec ses courses, et , bien plus loin, Maria.
Maria me dit qu'elle est contente. L'église était ouverte et elle a pu y entrer dedans. Elle a à la main un petit livre de prière. Ses yeux se noient lorsqu'elle me dit ça. je lui dis que je ressens l'émotion qu'elle a. Elle m'explique alors qu'il y a 20 ans, elle a fait un pèlerinage vers la vierge Fatima au Portugal, et qu'au retour, elle a eu un accident de voiture. dans la voiture, il y avait son mari, son fils bébé dans ses bras, et sa mère. Sa mère est morte ce jour là dans cet accident.
Les gens se confient, je n'en demande pas autant. Ça bouscule...
Je rentre.
Ah, Catherine m'a envoyé le numéro de téléphone de Liliane. Je vais lui envoyer un message maintenant.
VISMAVILLE IN CONTAINMENT // AT THE BALCON // Episode 14
11H, almost at the foot of the building, Marcel arrives, cap of the raiders on his head. Hello, clac: Photo. The sweatshirt still matches the cap.
Today I was leaving with a specific desire: I wanted people to show me what they were wearing on their feet when I came on the street.
Why? Well here it is: Yesterday evening, when my man came home from work, I was at home (of course this says ... Pffffff) and I took off my sneakers to put on my songs saying: voilà, the day is over. So, yes, my man looked at me strangely and shrugged his shoulders, looking as if he was used to my funny ideas.
In fact, since the first day of confinement, I've got into the habit of not staying in my slippers. I thought it made me look sick. So I put on this pair of sneakers I hadn't lied about in a long time. I put them on in the morning as soon as I'm dressed, and I take them off at night before sitting on the couch.
So I thought it would be interesting to see what my building mates had at their feet.
I asked them, and they did. I explained why... But this action quickly lost its interest when Liliane, 87 years old, from her 4th balcony said to me: I haven't been well for 2 days, I'm crying.
Catherine, the balcony closest to Liliane, had gone to fetch her evening socks to show them to me. When she came back on the balcony, she posed for the "sock" photo. I don't even know if at that moment, this photo is framed, properly exposed or sharp. I can't even get it right. Liliane's words echo deafeningly in my head: "J E P L E U R E".
I put the camera down and say to Catherine: "Liliane is not well, she tells me she is crying... »
Catherine... Incredible woman... stands at the end of her balcony, the closest to Liliane, and starts a conversation with this little lady with cloudy hair. They exchange phone numbers. Catherine offers to call her during the day, to send her messages. Here they are talking to each other. Phew, I confided Liliane's sadness to Catherine.
At the foot of the building comes the man I was hoping for.
Ah yes, I didn't tell you, Yesterday, on Facebook, commenting on a post about this adventure, Jerome arrives. Friends in common: Renaud Hantson. Jerome is a postman at Issy les Moulineaux. He's even chief postman! And tomorrow, he's touring the neighborhood!
Well at 11 am...er...and 15 min I think, he's coming! Jerome is the most rock'n'roll postman I've ever met ! Satan Jokers T-shirt, leather jacket under the postman's uniform, rocker sunglasses, skull and crossbones rings. I love it!
He explains to me that the tours are redistributed at the moment, and that indeed, they only tour for 3 days. But there's also less mail. So that's fine.
Liliane seems a bit better. She's also just realised that I work for the press. She apologises for not having understood that before and congratulates me on that. And she also understands that I'm here every day at 11 o'clock. So she promises to be here tomorrow.
At the end of the building, Eleanor's family is there. The girls show me some toys, and in particular a wind turnstile (Aaarf, how it's called these things ...) that her grandfather gave her. Eléonore also explains to me that the grandparents come every day to the place where I am to say hello to their little girls.
I go back home with the desire to be there tomorrow to check up on Liliane...
Ah, Catherine sent me her phone. I'll send her a message now.