SUSPENSION – LYON, 2012
En 2012, dans un squat à Lyon, j’ai été invité à assister à une représentation de suspension, un moment à la fois privé et intense. Seules quelques personnes sont présentes, un petit groupe de cinq jeunes, tous issus du milieu du tatouage et du piercing. Chaque geste est précis, rien n’est laissé au hasard. Tout est méticuleusement préparé : désinfection, choix des crochets, et installation des poulies et cordes. Chacun se perce la peau avec des crochets avant de se suspendre, se laissant tirer par les cordes. Certains se balancent légèrement, défiant la gravité.
Ce qui m’étonne au premier abord, ce n’est pas la douleur, mais leur expression faciale. Ils sourient. Comme des enfants sur une balançoire. Cette scène, aussi étrange qu’elle puisse paraître, n’est pas simplement un acte de souffrance physique, mais un rituel profondément ancré dans la quête spirituelle : l’Oh Kee Pa. À l'origine, un rituel de purification spirituelle chez les Amérindiens, il est aujourd’hui revisité dans le cadre du nouveau chamanisme, où il devient un moyen d'atteindre des états modifiés de conscience et d'engager un processus de guérison personnelle.
La représentation prend fin, et les jeunes suspendus doivent attendre plusieurs semaines avant de pouvoir refaire cette performance. Ils doivent laisser le temps à la peau de se réparer et de se recoller, comme une métaphore de la régénération, de la résilience et de la transformation. Ce rituel, loin d’être une simple démonstration de force physique, incarne une profonde recherche spirituelle, un chemin de guérison et de transcendance personnelle.
BODY SUSPENSION – LYON, 2012
In 2012, in a squat in Lyon, I was invited to witness a suspension performance, a moment both private and intense. Only a few people were present, a small group of five young individuals, all from the tattoo and piercing community. Every move was precise, nothing left to chance. Everything was meticulously prepared: disinfecting, choosing the hooks, and setting up the pulleys and ropes. Each person pierced their skin with hooks before suspending themselves, letting the ropes pull them up. Some gently swayed back and forth, defying gravity.
What struck me at first was not the pain, but their facial expressions. They smiled. Like children on a swing. This scene, as strange as it may seem, was not merely an act of physical suffering but a deeply spiritual ritual: the Oh Kee Pa. Originally a spiritual purification ritual among Native Americans, it is now revisited within the framework of new shamanism, becoming a means to reach altered states of consciousness and engage in personal healing.
The performance comes to an end, and the young participants must wait several weeks before they can perform again. They must allow time for their skin to heal and reconnect, like a metaphor for regeneration, resilience, and transformation. This ritual, far from being just a display of physical strength, embodies a profound spiritual quest, a path of healing and personal transcendence.