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Une terre étouffée
Avec les négociations avançant entre le gouvernement et la guérilla des FARC (Forces Armées Révolutionnaires de Colombie), la Colombie n'a jamais été aussi près d'en finir avec une guerre civile de plus de 50 ans. Dans les villes, la guerre semble déjà lointaine, abstraite. Elle est devenue invisible, se cachant au plus profond de l'inconscient collectif. Mais dans les campagnes, dans ces espaces ouverts convoités pour leurs ressources naturelles, la guerre est omniprésente. Elle domine la nature des relations sociales, des structures économiques et des jeux d'influence politique, s'inscrivant au plus profond des corps et des esprits et exacerbant une situation d'abandon pour des régions comme celle du Chocó (Nord-Ouest de la Colombie, peuplée presque uniquement par des communautés afro-descendante et autochtones.
L'isolation, le manque de communication, l'insuffisance de nourriture, l'inadéquation ou l'absence de services publics sont quelques unes des problématiques les plus pesantes causées par la guerre et le désintérêt du reste de la Nation. De tels stigmates rendent le processus de paix d'autant plus précaire.
Ce projet en cours de réalisation se concentre sur le bassin de la rivière Baudó, courant le long de la côte Pacifique dans le Chocó. Les nuances de vert générées par la chlorophylle dominent la région où l'on circule en empruntant le réseau de rivières et fleuves qui s'entrecroisent et relient chacune des communautés éparpillées entre les collines que la jungle recouvre.
Mais c'est une terre où l'on étouffe, une terre étouffée par la guerre et l'isolation. Selon le Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires, près de la moitié de la population du Chocó vit dans des conditions d'extrême pauvreté. 80 % des besoins basiques des habitants ne sont pas couverts. Et les restrictions de déplacement auquel le conflit conduit accentuent la situation d'insécurité alimentaire, tout particulièrement pour les communautés autochtones.
Le Alto Baudó vit au rythme des combats dans lesquels s'affrontent l'Armée, les forces paramilitaires d'extrême droite, censée être démobilisée, et la guérilla de l'ELN (guévariste), pour le moment exclue des négociations. Le Alto Baudó est un couloir stratégique donnant sur l'océan Pacifique. Les affrontements autour du contrôle territorial ont des conséquences directes pour les populations locales, tels les déplacements, le confinement ou encore le risque d'être accusé de soutenir l'un ou l'autre des belligérants. L'économie locale se base sur la production de bananes plantains. Quand la guerre s'intensifie, on se résigne à rester presque cloîtré dans sa communauté.
Les récoltes sont abandonnées et l'on cesse d'aller se ravitailler au village le plus proche. Pour compenser les pertes dans leur récolte de plantain, les paysans se tournent vers l'exploitation de la feuille de coca, à partir de laquelle ils produisent la coca-base pâte. Mais pour stopper cette première étape dans la production de cocaïne, l'État colombien mène une campagne d'éradication des plants de coca en épandant par les airs l'herbicide glyphosate, procédé connu sous le nom de fumigation.
L'usage du glyphosate (connu aussi sous le nom de Round-up, produit par Monsanto) est aujourd'hui remis en question en Colombie. Mais le produit a déjà eu de graves conséquences sur les populations, en aggravant l'insuffisance de nourriture et en développant des maladies.
Commencée en juillet 2014, cette série est un projet en cours de réalisation.
A Choked Land
With negotiations progressing between the government and guerilla group FARC, Colombia has never been so close to an end to a fifty-year long civil war. In the country's cities, the war already seems distant, abstract. It has become invisible and hidden deep in the back of public consciousness. But in the countryside, in open lands disputed by interests for their natural resources, war remains ubiquitous.
It profoundly dominates social relationships, economic structures, political influence and people's bodies and minds, exacerbating an already dire situation in neglected areas like the department of Choco (Northwest of Colombia) that are home almost entirely to indigenous and Afro-descendant communities.
Isolation, lack of communication, scarcity of food and inadequate public services are some of the most pressing issues caused by war and general national disinterest. Such stigmas make the peace process ever precarious.
This ongoing project focuses on the Baudo river basin, along the Pacific coast in Choco. The green shades of chlorophyll dominate this region where people use the river network to travel and communicate between villages across the jungle's hills. But it is a land where people suffocate, a land choked by war and isolation.
According to the Office for the Coordination of Humanitarian Affairs, almost half of Choco's population lives in extreme poverty and eighty percent of inhabitants' basic needs are not covered. The restriction of movement induced by the conflict exacerbates food insecurity, especially in indigenous communities.
The Upper Baudo lives to the rhythm of open combat between the army, right wing paramilitary forces and the leftist ELN guerilla group (National Liberation Army) that is for the moment excluded from peace talks.
It is a strategic corridor leading to the Pacific Ocean. These territorial disputes have direct consequences for local population like displacement, confinement, or the risk to be accused of being a supporter of one of the armed group. The local economy is based on plantain production. When war intensifies, the local population resigns itself to confinement; farming stops and supplies from the nearest village grind to a halt.
To compensate for losses in the plantain harvest, farmers turn to the coca leaves which produce coca paste. But to stop this first step in cocaine production, the Colombian state conducts a campaign to eradicate coca plants by using aerial spraying of glyphosate herbicide (also known as Round-up , produced by Monsanto), popularly known as "fumigation". Today, the glyphosate's use is questioned. The fumigation effects had severe consequences for the local population, worsening food scarcity or developing diseases.
This series is an on-going work.