Vacance en rond
En France, certaines expériences traversent la jeunesse quel que soit le milieu : 80,6 % des jeunes de 17 ans ont déjà consommé de l’alcool, et plus d’un tiers ont connu
un épisode de binge-drinking. Environ 30 % ont expérimenté le cannabis. Contrairement aux stéréotypes, ces comportements ne sont pas limités aux quartiers défavorisés. Chez les enfants d’immigrés, les troubles liés à l’alcool augmentent même avec les générations, révélant une tension plus diffuse : celle de trouver sa place dans une société où l’on se sent parfois invisible. C’est dans ce contexte que j’ai passé une semaine à Noé, petite ville paisible du sud-ouest de la France. Elle ne souffre ni d’un manque flagrant de moyens, ni d’une image stigmatisante. J’y ai suivi Ilias et ses amis des adolescents et jeunes adultes dont les familles, issues pour la plupart de l’immigration, ont réussi à construire une vie stable. Ces jeunes ne sont ni marginalisés, ni « en difficulté » au sens strict. Pourtant, au fil des jours, un sentiment s’installe : une forme de lassitude tranquille, une liberté qui tourne en rond. Durant cette semaine de vacances, je les ai vus vivre dehors : tourner en voiture, fumer, traîner, discuter, parfois boire des gestes anodins en apparence, mais qui traduisent un rapport flou au temps et à soi-même. Des gestes anodins, mais qui traduisent aussi ce besoin de souffler, de créer un espace à soi, dans un monde où la pression sociale et économique pèse tôt sur les épaules. Ici, elle est moins visible que dans les grandes villes, mais elle existe, diffuse. Ce que j’ai voulu montrer à travers cette série, ce sont des moments universels, captés dans le relâchement des vacances. Une jeunesse qui, entre héritage familial et réalités contemporaines, navigue dans un espace intermédiaire ni perdue, ni pleinement assurée à la recherche de son propre rythme.
Roundabout holidays
In France, certain experiences cross youth regardless of their background: 80.6% of 17-year-olds have already consumed alcohol, and more than a third have experienced a binge-drinking episode. Around 30% have experimented with cannabis. Contrary to stereotypes, these behaviors are not limited to disadvantaged neighborhoods. Among children of immigrants, alcohol-related issues even increase across generations, revealing a more diffuse tension: the struggle to find one’s place in a society where one sometimes feels invisible.
It is in this context that I spent a week in Noé, a quiet town in southwestern France. The town suffers neither from a glaring lack of resources nor from a stigmatized image. I followed Ilias and his friendsteenagers and young adults whose families, mostly of immigrant origin, have managed to build stable lives. These young people are neither marginalized nor “in difficulty” in the strict sense. Yet, over the course of the days, a feeling emerges: a kind of quiet weariness, a freedom going in circles.
During this week of holidays, I saw them living outside: driving around, smoking, hanging out, chatting, sometimes drinking, gestures that seem trivial on the surface but reveal a blurred relationship with time and themselves. Trivial gestures, but ones that also reflect the need to breathe, to carve out a personal space in a world where social and economic pressure weighs on shoulders early. Here, it is less visible than in big cities, but it exists, diffuse.
Through this series, I wanted to show universal moments captured in the relaxation of holidays. A youth that, between family heritage and contemporary realities, navigates an intermediate space neither lost nor fully secure searching for its own rhythm.