OASIS KERLANIC - UNE COMMUNAUTÉ AUTONOME EN BRETAGNE #2
C'est l'hiver sur l'Oasis Kerlanic, une communauté au coeur du Centre Bretagne qui vit en autonomie alimentaire et énergétique. Le froid et l'humidité de ce mois de janvier impose une vie rude. Les bâtiments sont peu isolés. Le poêle à bois du salon devient ainsi le point de rendez-vous pour les âmes en quête de chaleur. Il est nécessaire d'aller souvent couper du bois dans la forêt mais, comme le répète Audrey, « pas question de prendre plus que ce que la forêt nous offre » ; seul le bois des arbres tombés est récolté.
A la nuit tombée, les bouilloires ne cessent de siffler afin que chacun remplisse sa bouillotte d'eau chaude. Tandis que, au petit matin, il est très difficile de sortir des couvertures tellement l'air est glaçant.
On se rassure en se disant que nos aïeux vivaient ainsi.
Le lieu évolue, des constructions aboutissent et la communauté compte désormais de nouveaux habitants.
Ludovic est arrivé il y a un peu plus d'un an. Il estimait ne pas se sentir à sa place dans la société et il tapait régulièrement sur Youtube les termes « autonomie » et « autarcie ». Un soir, il est tombé sur une vidéo de l'Oasis Kerlanic et cela l'a subjugué. Il a rapidement contacté Audrey puis il est venu s'installer ici. Son premier hiver fut difficile mais il a tenu bon, il raconte encore : « Le matin, j'allais casser la glace pour pouvoir donner de l'eau aux animaux. Je recevais des giclées d'eau glacée sur le visage, ça réveille. ». Ancien cuisinier dans une chaine de restaurants traditionnels, il s'est désormais converti à la cuisine végétarienne et c'est lui qui régale toute la communauté.
Vincent a lui quitté son travail et son appartement il y a plus d'un an pour partir en voyage en Australie, au Laos et en Thaïlande. Il a vécu une certaine désillusion à travers ce voyage, déçu de retrouver les mêmes sociétés consuméristes jusqu'en Extrême-Orient et de réaliser que ce type de voyage s'avère souvent être un acte de consommation comme un autre. Il est ensuite rentré en France pour entamer un voyage plus simple, à vélo, avec d'autres ambitions. Celui-ci l'a mené jusqu'à l'Oasis Kerlanic où il est installé depuis plusieurs mois.
Il y a également Logan qui a vu mon premier reportage sur la communauté et qui a été intrigué. Lassé par la ville, il cherchait un lieu plus serein pour vivre. Il est passé une après-midi pour découvrir le lieu et ses habitants puis il est revenu quelques mois plus tard pour s'installer. Il était convaincu qu'il serait bien ici et qu'il n'hésiterait pas à donner de sa personne au quotidien. Il apprécie principalement sa liberté ainsi que l'omniprésence des animaux et de la nature. Plutôt réservé, il n'en est pas pour autant dénué d'humour. Il enchaine sans cesse les calembours avec Ludovic.
« La Terre n'appartient à personne »
Comme l'explique Audrey, elle n'est désormais plus l'unique propriétaire du lieu. Il appartient désormais à une SCI (Société Civile Immobilière) et compte donc de multiples propriétaires.
Audrey estime que le lieu est désormais plus structuré : « On a mis en place un parcours d'intégration pour les gens souhaitant rejoindre la communauté à long terme ». Ce parcours est basé sur « l'envie, le plaisir et le partage de deux valeurs fondamentales ». La bienveillance, « respect et amour envers soi-même, les autres êtres humains, les animaux et la Terre » ; ainsi que l'autonomie, « prôner une autonomie alimentaire, énergétique, et ne pas être dans la surconsommation ».
Les habitants de Kerlanic ont ressenti le besoin de « se protéger et protéger leur lieu de vie » car des personnes qui ne partageaient pas les valeurs en question sont venues, créant de réelles difficultés relationnelles.
Audrey s'explique le sourire aux lèvres : « Cette vie fait rêver, et eux ils sont dans l'engrenage de la servitude moderne. Il s'agit d'un réel choix de vie de nous rejoindre et il faut l'assumer. Les gens ne se rendent pas forcément compte de l'aspect rudimentaire que cela incombe. Nous ne sommes pas spécialement à la recherche de nouveaux habitants, on n'est pas dans un recrutement. On laisse faire l'univers. ». Par ailleurs, l'accueil et les visites sont toujours de mise sur le lieu : « On aime faire des rencontres. Cela nous permet de montrer que ce mode de vie est possible ainsi que de laisser aux gens la possibilité de faire tranquillement leur transition intellectuelle, citoyenne et écologique. »
Grâce à l'arrivé de nouveaux habitants responsables, Audrey peut aujourd'hui déléguer une partie des taches essentielles à l'équilibre de l'éco-lieu. Ainsi, elle peut désormais donner des conférences et des formations en dehors de Kerlanic afin de partager plus largement ses valeurs. Elle travaille également à la fabrication de produits durables à base de matériaux de récupération comme des serviettes hygiéniques lavables. A travers cette action, elle est fière de pouvoir prôner le « zéro déchet ».
Noa lui ne va toujours pas à l'école. Il continue de faire ses propres choix. Récemment, il a même décidé de son propre chef de devenir végétarien.
Il entre dans l'adolescence et, même s'il est « différent », il commence à aller sur l'ordinateur comme les autres enfants de son âge.
Audrey confie que son souhait principal est que cet équilibre perdure le plus longtemps possible et elle incite chacun à « toujours garder espoir ».
OASIS KERLANIC - AN AUTONOMOUS COMMUNITY IN BRITTANY #2
It is winter on the Oasis Kerlanic, a community in the heart of Central Brittany that lives in food and energy autonomy. The cold and dampness of this January imposes a harsh life. The buildings are poorly insulated. The wood stove in the living room thus becomes the meeting point for souls in search of warmth. It is necessary to cut wood often in the forest but, as Audrey repeats, "there is no question of taking more than what the forest offers us"; only the wood from fallen trees is harvested.
At nightfall, the kettles keep whistling so that everyone can fill their kettles with hot water. While, in the early morning, it is very difficult to get out of the blankets because the air is freezing.
We reassure ourselves that our forefathers lived like this.
The place evolves, constructions are completed and the community now has new inhabitants.
Ludovic arrived a little over a year ago. He felt he did not feel at home in society and regularly typed the terms "autonomy" and "autarky" on Youtube. One evening, he came across a video of the Oasis Kerlanic and it captivated him. He quickly contacted Audrey and then moved here. His first winter was difficult but he held on, he still says: "In the morning, I would break the ice so I could give the animals water. I was getting ice water splashed on my face, it wakes me up. ». A former cook in a traditional restaurant chain, he has now converted to vegetarian cuisine and is the one who treats the whole community.
Vincent left his job and apartment more than a year ago to travel to Australia, Laos and Thailand. He experienced a certain disillusionment through this journey, disappointed to find the same consumerist societies in the Far East and to realize that this type of journey often turns out to be an act of consumption like any other. He then returned to France to start a simpler journey, by bike, with other ambitions. This one led him to the Kerlanic Oasis where he has been living for several months.
There was also Logan who saw my first report on the community and was intrigued. Tired of the city, he was looking for a more serene place to live. He spent an afternoon to discover the place and its inhabitants and then returned a few months later to settle down. He was convinced that he would be comfortable here and that he would not hesitate to give of himself on a daily basis. He mainly appreciates his freedom as well as the omnipresence of animals and nature. Rather reserved, he is not without humour. He is constantly playing puns with Ludovic.
"The Earth belongs to no one"
As Audrey explains, she is no longer the sole owner of the place. It now belongs to a SCI (Société Civile Immobilière) and therefore has multiple owners.
Audrey believes that the place is now more structured: "We have set up an integration program for people who want to join the community in the long term". This itinerary is based on "the desire, pleasure and sharing of two fundamental values". Caring, "respect and love for oneself, other human beings, animals and the Earth"; as well as autonomy, "advocating food and energy autonomy, and not being in over-consumption".
The inhabitants of Kerlanic felt the need to "protect themselves and their place of life" because people who did not share the values in question came, creating real relational difficulties.
Audrey explains herself with a smile on her face: "This life makes people dream, and they are in the spiral of modern servitude. It is a real choice of life to join us and we must assume it. People do not necessarily realize how rudimentary this is. We are not specifically looking for new inhabitants, we are not in a recruitment process. We let the universe do its work. ». In addition, the welcome and visits are always welcome on the spot: "We like to meet people. This allows us to show that this way of life is possible and to give people the opportunity to make their intellectual, civic and ecological transition in a peaceful way. »
Thanks to the arrival of new responsible residents, Audrey can now delegate some of the tasks essential to the eco-place's balance. Thus, she can now give conferences and training sessions outside Kerlanic in order to share her values more widely. It also works on the manufacture of durable products based on recycled materials such as washable sanitary napkins. Through this action, it is proud to be able to promote "zero waste".
Noa still doesn't go to school. He continues to make his own choices. Recently, he even decided on his own to become a vegetarian.
He is entering adolescence and, even if he is "different", he is starting to go to the computer like other children of his age.
Audrey says her main wish is that this balance will last as long as possible and she encourages everyone to "always keep hope".