Chine- L'ambassadeur devenu paysan
LE REVE DU VIEUX CARAVANIER
Qu il est bon de rencontrer un homme qui n a pas renonce ! A 70 ans bien tasses, Patrick Nijs fait partie de ceux qui ne cesseront jamais de m etonner par la force de leurs convictions, leur droiture, leur generosite et par dessus tout, leur amour de la vie sous toutes ses formes. On appelle aussi ces gens la des reveurs parce que le cynisme ne les a pas gates et qu ils sont, malgre les annees, porteurs de projets fous.
Celui de Patrick tient en un mot Kabissa. Nichee sur les pentes des montagnes du nord du Yunnan en Chine, Kabissa est une ferme modele de permaculture et qui a terme devrait devenir un centre international de permaculture. Pour le moment elle en est encore a ses debuts et ses 2 hectares de terre reparties sur 5 terrasses se remettent tout juste des mauvais traitements a coups d engrais, de pesticides et de couvertures plastique qu elles ont subit pendant des decennies.
AUX ORIGINES ETAIT UNE VISION
Il y a plus de 10 ans, lorsque Patrick parcourt pour la premiere fois Dongchuan, la province natale de sa compagne Minyan, son enfance passee au Congo Belge (Republique Democratique du Congo aujourd hui) le rattrape. C est la terre infiniment rouge alliee a la vegetation luxuriante de cette partie du Yunnan qui l hypnotise. Il lui vient l envie d oter ses chaussures et de fouler la glebe qu il voudrait faire sienne. Il veut preparer son depart ici, sur ce sol qui ne lui appartiendra jamais tout a fait (en Chine, personne ne peut etre proprietaire terrien. La terre appartient au peuple tout entier et l Etat loue des concessions pour 70 ans). Il est ne dans un pays vole, il mourra dans un pays qui veut l accueillir.
Pourtant au depart rien ne le predisposait a mener une existence de neo-paysan comme il se definit lui-meme ironiquement. Apres avoir travaille dans le secteur de l enseignement dans differents pays d Afrique, il decide d entamer une carriere dans la diplomatie. D abord numero deux a l ambassade du Burundi, il est nomme Consul a Osaka puis Shanghai pour finalement endosser le role d Ambassadeur a Pekin. A ce titre, il rencontre les grands de ce monde dont bien sur Xi Jinping qu il cotoiera a plusieurs reprises.
Tres jeune, il sent qu il a un probleme avec la philosophie occidentale. «
Je suis ne au Congo dans ce terrifiant malentendu que fut la colonisation et j ai vecu trop de contradictions sous pretexte de developpement pour que je me retrouve pleinement dans sa pensee". Il se tourne vers la philosophie orientale dont il decouvre l extraordinaire complexite et c est surtout sa conception de l Energie qui le fascine. Son chemin spirituel s acheve alors avec la decouverte du Taoisme dont il pratique desormais la meditation quotidiennement.
Mais quand on a vecu une existence vagabonde telle que la sienne, quand vos enfants sont aux 4 coins du monde, quand, ou et pourquoi poser ses valises ? C est lorsqu il rencontre sa compagne a Pekin et que celle-ci l incite a ecouter son desir profond de retour aux sources qu il decide de prendre sa retraite anticipee, de s installer dans sa ferme du Yunnan et d entamer le dernier grand projet de sa vie reparer des decennies de gabegie agricole, participer enfin a un modele durable et non pilleur de ressources, apporter sa pierre a l edification d un monde respectueux de la vie et laisser aux generations futures l espoir que tout peut s arranger (ou presque).
POURQUOI ICI EN CHINE UNE FERME DE PERMACULTURE ?
Par amour, repond Patrick. L amour pour Mynian et leurs enfants. «
Je voulais a la fois reconcilier cette famille complexe qui est la mienne et reprendre le chemin de la Nature qui est depuis toujours pour moi comme le berceau de mes origines, mon point Omega de la respiration ».
Et puis il y a la culture chinoise impregnee de Taoisme, de Confucianisme et de Bouddhisme. En particulier, «
le Taoisme sait, depuis sa fondation au 7eme siecle avant Jesus-Christ, que l harmonie entre l homme et la nature est la source du bonheur, de la longevite et de l harmonie. Il s agit de la cosmologie la plus ecologique qui ait ete concue par le Sapiens . Ici, il y a des genes de civilisation qui lui donnent acces a une revolution ecologique ». Et il est vrai que la recrudescence du Taoisme et de Bouddhisme est palpable en Chine. Elle va de pair avec la renaissance culturelle qui suit la renaissance economique tant mises a mal a l epoque Mao. «
La renaissance de l Europe a commence par les Lumieres, et de la sphere intellectuelle et culturelle elle a percole vers la sphere economique. En Chine, le mouvement est inverse. En bons Marxistes, ils ont commence par l infrastructure et l economie. Aujourd hui, la renaissance atteint le domaine de la superstructure, celle des consciences, de l imaginaire, de la culture, de la spiritualite. »
« Par conviction » ajoute-t-il. «
Pourquoi marquons-nous tant de reticence a rejoindre l initiative de la Chine a recreer une civilisation sur l ancienne route de la soie ? Recreer un maillage sur les traces de Samarcande fait-il si peu de sens pour l humanite ? » Patrick lui veut faire partie de ces caravaniers qui rapprochent les peuples. Il sait aussi que l avenir de l humanite, sa survie, ne se fera que dans un monde global et que notre sort tient dans la cooperation internationale. Le partenariat avec la Chine est determinant si l on veut limiter les degats du changement climatique. Par son gigantisme contre lequel on ne peut plus rien, la Chine est un pivot de l avenir et le grand defi des prochaines decennies est l integration de la Chine au monde et du monde a la Chine. L UE est historiquement impregnee de la necessite d une transition ecologique. La Chine s est emparee plus recemment de l urgence climatique et de son binome ecologique en operant un virage draconien dans son economie. Mais contrairement a chez nous, "
la grande mutation ecologique indispensable partira du sommet et ce sommet a les moyens de definir une orientation a toute la societe. Ceci constitue egalement une des raisons pour lesquelles je crois en ce pays il dispose encore d un Etat capable de resister aux interets particuliers pour prendre des options servant le bien commun. »
KABISSA
Le nom de Kabissa vient du Kiswahili, l idiome du Congo qui signifie "absolument", « resolument », un mot qui exprime une volonte d aboutir forte. Lorsqu il l acquiert en 2013, Patrick etait encore en poste a Pekin et il leur fallait des heures pour rejoindre sa propriete depuis l aeroport de Kunming. Depuis, l autoroute a ete construite ce qui a significativement desenclave la vallee de Dongchuan et tous ses villages perches sur les hautes montagnes alentours, dont un sommet a 4400 metres.
A l origine, c etait une une ferme traditionnelle en piteux etat a l ecart du minuscule village de Lao Zhuan Di. A leur grand dam, seule la structure de la batisse principale a pu etre conservee et restauree. Aujourd hui elle sert de bibliotheque et de bureau. De nouveaux batiments ont ete construits autour afin de respecter la tradition de la cour interne et ils accueillent leur logement principal ainsi que des chambres pour leurs 6 enfants. En leur absence, elles servent de chambres d hotes.
Des le debut, les plans prevoyaient egalement la construction d une serre attenante de maniere a pouvoir cultiver leurs legumes en hiver et mettre en nourrice d autres plantes alimentaires et medicinales.
Bien que situee a 2100 metres d altitude, il ne fait jamais tres froid ici et les gelees sont relativement rares. Le rythme des saisons est d ailleurs assez deroutant pour un europeen. L hiver est marque mais c est l epoque la plus seche, le printemps est chaud, l ete frais et humide alors que l automne retrouve la saison seche. Aussi, lorsque Patrick decide d entamer la reconversion de Kabissa en ferme de permaculture, il lui a fallu une longue phase d adaptation.
LES CULTURES
Il lui a fallu tout d abord nettoyer ses terre et notamment la debarrasser du plastique dont les agriculteurs se servent comme paillage pour diminuer l arrosage et les herbicides. Officiellement, ce plastique est biodegradable mais dans les faits, le sol se gorge de polymeres car chaque annee les agriculteurs mettent de nouvelles baches. Or, ce plastique met bien plus qu un an pour se deteriorer. La reglementation a change recemment et est devenue beaucoup plus contraignantes. Il est donc a esperer que les paysans soient fournis par l industrie avec un plastique veritablement biodegradable. Mais les consequences des annees precedentes sont bel et bien la.
Parallelement, Patrick a plante des arbres fruitiers ainsi que des rosiers et des pivoines pour la medecine traditionnelle chinoise. Les fleurs, c est d ailleurs plutot le domaine de Minyan et elles devaient assurer des revenus au demarrage.
Comme toute ferme de permaculture, Patrick trace des plans complexes pour associer toutes sortes de cultures potageres et cerealieres, et pour qui ne connait pas son terrain, surtout au printemps alors que les vegetaux en sont encore au tout premier stade, c est une gageure de s y promener seul sans abimer les jeunes pousses !
Un hectare du domaine est occupee par une foret pins que Patrick laisse vivre sa vie. Ces pins ont ete plantes il y a une vingtaine d annees dans le cadre d un plan de reforestation. En effet, tous les bois de la region avaient ete rases au profit des mines de cuivre qui en ont d ailleurs fait sa prosperite. Lorsque dans les annees 90 les gisements ont ete epuises, les autorites ont enfin realise a quel point la region avait ete fragilisee ecologiquement par ce deboisement massif. Donc en plus de ces forets de pins, toutes les terrasses cultivables ont ete plantees de noyers qu il est absolument interdit d abattre.
Pour l aider, Patrick peut compter sur des volontaires qui viennent regulierement de toute la Chine et surtout sur Xiao Huang, un jeune paysan arrive de la province du Zhejiang. Ce dernier y travaille maintenant a plein temps. Quand il est arrive a Kabissa, il voulait en apprendre plus sur l agriculture biologique et surtout approfondir sa demarche. D apres Patrick, "
Xiao Huang a cette intelligence de la terre qui lui a fait immediatement comprendre les enjeux de la permaculture. J espere vraiment qu il voudra rester longtemps ici car son apport est essentiel ». Des voisins viennent egalement preter main forte meme si ceux-ci doivent etre « surveilles » de pres car ils n ont pas les reflexes d un permaculteur. «
Un jour que je n etais pas la, mon voisin a laboure une de mes terrasses ! Il voulait bien faire c est sur, mais on ne fait jamais ca en permaculture ! On paille !".
Bien sur Patrick n a pas que des amis dans le voisinage car certains ne voient pas d un bon oeil cet uluberlu, etranger qui plus est, qui cultive des terres de maniere si peu orthodoxe et qui vient frontalement contredire leurs pratiques. Mais globalement il est bien accueilli, meme si pour ces gens du cru il restera toujours « l Ambassadeur Etranger ». «
Ma voisine qui me donne un coup de main se marre systematiquement quand elle me voit travailler dans les champs, pour elle je suis un ovni ».
Mais apprendre un sol, l observer, trouver les especes qui s y epanouissent, le restaurer, decouvrir un climat, cela prend du temps et pour le moment la ferme n est pas encore rentable. Patrick estime qu il lui faut encore 4 ans pour parvenir a un equilibre et pour enfin pouvoir tirer des benefices.
Mais ca ne l empeche pas de travailler sur un projet encore plus ambitieux que sa propre ferme creer une communaute internationale de permaculture a Lao Zhuan Di et convaincre les paysans locaux d adopter une agriculture respectueuse de l environnement.
LE PROJET
Optimiste ou pessimiste, on ne saurait le dire a propos de Patrick. «
Nous courons vers le gouffre. Mourir, quitter ce monde est normal et naturel pour les creatures infiniment ephemeres que sont chacun d entre nous. Se dire que ce monde nous quitte tout entier et que nous le tuons m est insupportable. Cette impermanence la, je ne l accepte pas. » Pour Patrick, l urgence aujourd hui sont plus les droits du sol qui nourrit la vie que les droits de l Homme que nous devoyons chaque jour.
C est pour ca que Kabissa existe. Creer une communaute de paysans respectueux de l environnement, partager les savoirs et les experiences, enseigner, faire de la recherche, introduire des innovations de haute technologie comme l Intelligence Artificielle et la robotique, telles sont les ambitions de Patrick accompagnees d une volonte qu elles se fassent dans un contexte international. «
Il se trouve que Kabissa est en Chine et son propos est d amener les esprits a se concentrer sur les problemes les plus urgents. Il ne s agit plus de faire de la vieille politique en suivant les allees eculees des vieux debats truques. En caricaturant un peu, je dirais qu il s agit de mettre les grands esprits de ce monde sur le probleme des toilettes seches. »
Et le vieux village de Lao Zhuan Di peut etre le theatre de cette entreprise. En effet, il y a quelques mois, les habitations jugees dangereuses et trop vetustes ont ete videes de leurs habitants. Ces derniers ont recu des subsides de l Etat afin de construire des maisons neuves a quelques kilometres de la. Le vieux village a donc ete abandonne et ne restent plus que les betes que les agriculteurs laissent astucieusement ici afin d obtenir de plus larges compensations en cas de rachat des batiments.
Ainsi, les maisons pourraient tout a fait etre renovees et Xiao Huang s est d ailleurs installe au village. Dunhua, une biologiste universitaire qui a decide de changer de vie pour se consacrer a l agriculture biologique, est en train de choisir la maison qui abritera son plan d avenir. Sa presence scientifique est essentielle pour le projet. Et d autres soutiens, Chinois mais aussi d autres nationalites venant de toute la Chine suivent attentivement le projet et y contribuent a leur maniere, certains prets a investir quand le moment sera le bon.
Patrick travaille en parallele avec les autorites locales et nationales sur le bien fonde du projet, et notamment en multipliant les conferences. Fort de son passe d Ambassadeur, il est ecoute avec attention, notamment parce que tout le monde sait qu il a cotoye Xi Jinping et la politique pout lutter contre le changement climatique de ce dernier est bien sur dans toutes les tetes. Patrick ne manque pas de se servir de cet atout majeur afin de convaincre que si un tel Centre voyait le jour et que si les agriculteurs de cette region du Yunnan se joignaient a l effort, accompagnes par les autorites, les retombees sur la population locale et les politiques seraient en tous points positives.
Cependant, si les Chinois sont extremement sensibles a cette autorite du pouvoir, ils n en demeurent pas moins tres pragmatiques et demandent la preuve par les faits de la faisabilite d une telle transformation. Et pour l heure, la ferme de Patrick n etant pas encore rentable, ils ne voient pas encore comment effectuer la transition vers une agriculture biologique sans perte de rendements ni de revenus, d autant que dans le monde paysan, et c est un fait universel, le conservatisme est plutot de mise. Et ce n est acceptable pour personne en Chine a l heure actuelle d a la fois perdre de l autonomie alimentaire dans certains secteurs et d augmenter le cout des denrees agricoles.
LE CONTEXTE GLOBAL
L agriculture chinoise est majoritairement intensive de type traditionnel. Encore peu mecanisee hormis dans quelques regions de grandes plaines, l agriculture intensive moderne est peu pratiquee. Ainsi, l effort physique au plus pres de la terre n a pas ete oublie et le travail manuel du sol, y compris avec des betes de somme est encore largement repandu, les parcelles sont petites et les terrasses dans les nombreuses regions montagneuses sont toujours travaillees. Il y a bien sur beaucoup de problemes auxquels il faut remedier d urgence (utilisation des engrais et pesticides, usage immodere de ce plastique de paillage) mais pour toutes les raisons evoquees precedemment, il se peut que la necessaire revolution ecologique soit moins brutale ici que dans nos contrees ou l agriculture intensive moderne est devenue majoritairement la norme. De plus, l exode rural etant encore tres recent et les habitudes culinaires quasiment exclusivement a base de produits frais, les citadins pratiquent donc encore massivement l agriculture potagere individuelle, y compris dans des endroits les plus improbables tels que les balcons, les toits, les ruelles, ou de maniere provisoire comme aux abords des chantiers, et en fait partout ou il y a de la terre disponible.
Depuis les annees 90, lorsqu il a ete evident fallait rectifier le tir de 30 annees de laisser aller environnemental (ce que les acteur politiques appelaient eux-memes « Polluer d abord, controler ensuite », les preoccupations du peuple chinois sur la qualite et la securite alimentaires sont majeures. Depuis une dizaine d annees plus precisement, les labels agricoles bio se sont multiplies, pouvant d ailleurs preter a confusion car certains sont plus proches du greenwaching que du veritable bio. Il faut toutefois mentionner le Chinese National Organic Products Standard, reconnu comme l un des plus restrictifs au monde. Au depart destines aux exportations, les produit biologiques chinois sont desormais sur le marche interieur et la part de cultures bio sur le territoire ne cesse d augmenter.
Mais il y a egalement un phenomene relativement recent et de plus en plus marque qui est en train de faire son apparition. Appele « la vie avec peu de desir » (low desire life) , ce mouvement promeut une vie econome, rejette le consumerisme, les normes de la vie urbaine et rejette ce qu il appelle l esclavagisme moderne consistant a travailler toujours plus dans un univers de completion acharnee. Porte par les reseaux sociaux, il convertit de plus en plus de jeunes urbains a la vie a la campagne et favorise un tourisme vert qui connait une expansion rapide.
L AVENIR
Le caravanier reussira-t-il ce projet d une envergure inestimable pour notre bien a tous ? Il ose emprunter des chemins que seuls les visionnaires sont capables de defricher.
Personne n a toutes les solutions, pas plus les occidentaux que les chinois ou les africains et notre avenir tient dans une cooperation planetaire. Les crispations politiques ne font que rendre plus critique le danger d extinction qui nous menace.
«
Je refuse d etre pris entre l eau et le feu. Je dois le dire haut et fort et exhorter tous mes contemporains a sortir de leur orniere mentale pour gerer notre avenir. C est imperieux, c est une question de survie ». Kabissa est « comme le lotus fragile qui fleurit dans la vase, je dois tenter de donner a cet espace de l entre deux les couleurs de l espoir. C est le devoir de ma condition. »
The ambassador turned farmer
THE DREAM OF THE OLD CARAVANNER
How good it is to meet a man who has not given up! At 70 years old, Patrick Nijs is one of those who will never cease to amaze me by the strength of their convictions, their uprightness, their generosity and above all, their love of life in all its forms. We also call these people dreamers because cynicism has not spoiled them and they are, despite the years, carriers of crazy projects.
Patrick s project can be summed up in one word Kabissa. Nestled on the slopes of the northern mountains of Yunnan, China, Kabissa is a model permaculture farm that should eventually become an international permaculture center. For the moment it is still in its beginning stages and its 2 hectares of land spread over 5 terraces are just recovering from decades of abuse by fertilizers, pesticides and plastic covers.
IN THE BEGENNING WAS A VISION
More than 10 years ago, when Patrick travelled for the first time to Dongchuan, the native province of his wife Minyan, his childhood spent in the Belgian Congo (now the Democratic Republic of Congo) caught up with him. He was hypnotized by the infinitely red earth and the lush vegetation of this part of Yunnan. He feels like taking off his shoes and treading on the soil that he would like to make his own. He wants to prepare his departure here, on this soil which will never belong to him completely (in China, nobody can be a landowner. The land belongs to the whole people s nation and the state rents concessions for 70 years). He was born in a stolen country, he will die in a country that wants to welcome him.
Yet at the beginning nothing predisposed him to lead a neo-peasant life, as he ironically defines himself. After having worked in the teaching sector in various African countries, he decided to start a career in diplomacy. First as number two at the Burundian Embassy, he was appointed Consul in Osaka and Shanghai before finally taking on the role of Ambassador in Beijing. In this capacity, he met the great leaders of the world, including Xi Jinping, whom he met on several occasions.
At a very young age, he felt that he had a problem with Western philosophy. "
I was born in the Congo in this terrifying misunderstanding that was colonization and I have lived too many contradictions under the pretext of development for me to find myself fully in its thought". He turned to oriental philosophy and discovered its extraordinary complexity, and especially its conception of Energy that fascinated him. His spiritual path ended with the discovery of Taoism, whose meditation he now practices daily.
But when you have lived a vagabond life such as his, when your children are in the four corners of the world, when, where and why should you put down your bags? It is when he meets his girlfriend in Beijing and she encourages him to listen to his deep desire to return to his roots that he decides to take early retirement, to settle in his farm in Yunnan and to start the last great project of his life to repair decades of agricultural mismanagement, to participate at last in a sustainable model that does not plunder resources, to contribute to the construction of a world that respects life and to leave to future generations the hope that everything can be fixed (or almost).
WHY HERE IN CHAINA A PAERMACULTURE FARM?
For love, Patrick answers. Love for Mynian and their children. "I wanted both to reconcile this complex family of mine and to return to the path of Nature, which has always been for me like the cradle of my origins, my Omega point of breathing » .
And then there is the Chinese culture impregnated with Taoism, Confucianism and Buddhism. In particular, "
Taoism knows, since its foundation in the 7th century BC, that harmony between man and nature is the source of happiness, longevity and harmony. This is the most ecological cosmology that has been conceived by the Sapiens . Here, there are genes of civilization that give us access to an ecological revolution". And it is true that the resurgence of Taoism and Buddhism is palpable in China. It goes hand in hand with the cultural renaissance that follows the economic renaissance, both so badly damaged during the Mao period. "
Europe s renaissance began with the Enlightenment, and from the intellectual and cultural sphere it percolated to the economic sphere. In China, the movement is the opposite. As good Marxists, they started with the infrastructure and the economy. Today, the renaissance is reaching the realm of the superstructure, that of consciousness, of the imagination, of culture, of spirituality. "
By conviction, he adds. "
Why are we so reluctant to join China s initiative to recreate a civilization on the ancient silk road? Does recreating a network in the footsteps of Samarkand make so little sense for humanity? "Patrick wants to be one of the caravaneers who bring people together. He also knows that the future of humanity, its survival, will only happen in a global world and that our fate depends on international cooperation. The partnership with China is crucial if we want to limit the damage of climate change. With its gigantic size, against which nothing can be done, China is a pivot of the future and the great challenge of the next decades is the integration of China into the world and of the world into China. The EU is historically imbued with the need for an ecological transition. China has more recently seized the climate emergency and its ecological binomial by making a drastic turn in its economy. But unlike here, "
the great ecological mutation that is indispensable will start from the top and this top has the means to define a direction for the whole society. This is also one of the reasons why I believe in this country it still has a state able to resist private interests to take options that serve the common welfare. "
KABISSA
Kabissa s name comes from Kiswahili, the idiom of the Congo which means "absolutely," "resolutely," a word that expresses a strong will to succeed. When he acquired it in 2013, Patrick was still stationed in Beijing and it took them hours to reach his property from the Kunming airport. Since then, the highway has been built which has significantly opened up the Dongchuan Valley and all its villages perched on the high mountains around, including a 4400 meter peak.
Originally, it was a shabby traditional farmhouse outside the tiny village of Lao Zhuan Di. To their dismay, only the main building structure was preserved and restored. Today it serves as a library and office. New buildings were built around it to respect the tradition of the inner courtyard and they are their main dwelling as well as rooms for their 6 children. In their absence, they serve as guest rooms.
From the beginning, plans also included the construction of an adjoining greenhouse so that they could grow their vegetables in winter and nurse other food and medicinal plants.
Although located at an altitude of 2100 meters, it never gets very cold here and frosts are relatively rare. The rhythm of the seasons is quite confusing for a European. The winter is marked but it is the driest time, the spring is warm, the summer is cool and humid while the autumn is the dry season. So when Patrick decided to convert Kabissa into a permaculture farm, it took him a long time to adapt.
THE CROPS
First of all, he had to clean his land and notably get rid of the plastic that farmers use as mulch to reduce watering and herbicides. Officially, this plastic is biodegradable but in fact, the soil is full of polymers because every year the farmers put new covers. This plastic takes much longer than a year to deteriorate. The regulations have changed recently and have become much more restrictive. It is therefore hoped that farmers will be supplied by the industry with a truly biodegradable plastic. But the consequences of previous years are still there.
At the same time, Patrick has planted fruit trees as well as roses and peonies for traditional Chinese medicine. Flowers are more Minyan s domain, and they were intended to provide income at the beginning.
As with any permaculture farm, Patrick makes complex plans to combine all kinds of vegetable and cereal crops, and for those who don t know their land, especially in the spring when the plants are still in their very early stages, it is a challenge to walk around on your own without damaging the young shoots!
One hectare of the domain is occupied by a pine forest that Patrick lets live its life. These pines were planted about twenty years ago as part of a reforestation plan. Indeed, all the woods of the region had been razed to the benefit of copper mines which made its prosperity. When in the 90 s the reserves were depleted, the authorities finally realized how much the region had been ecologically weakened by this massive deforestation. So in addition to these pine forests, all the cultivable terraces have been planted with walnut trees which it is absolutely forbidden to cut down.
To help him, Patrick can count on volunteers who regularly come from all over China and especially on Xiao Huang, a young farmer from Zhejiang province. He is now working there full time. When he came to Kabissa, he wanted to learn more about organic farming and especially to deepen his approach. According to Patrick, "
Xiao Huang has this intelligence of the land that made him immediately understand the challenges of permaculture. I really hope that he will want to stay here for a long time because his contribution is essential". Neighbors also come to help, even if they have to be "watched" closely because they don t have the reflexes of a permaculturist. "
One day when I wasn t there, my neighbor plowed one of my terraces! He meant well for sure, but you never do that in permaculture! We mulch!".
Of course Patrick does not have only friends in the neighborhood because some do not see with a good eye this "uluberlu", foreigner moreover, who cultivates grounds in a so unorthodox way and which comes to contradict frontally their practices. But on the whole he is well received, even if for the locals he will always remain the "foreign ambassador". "
My neighbor, who helps me out, always laughs when she sees me working in the fields, for her I am a UFO".
But learning a soil, observing it, finding the species that thrive there, restoring it, discovering a climate, all this that takes time and for the moment the farm is not yet financially viable. Patrick estimates that he needs another 4 years to reach a balance and to finally be able to make a profit.
But that doesn t stop him from working on a project even more ambitious than his own farm creating an international permaculture community in Lao Zhuan Di and convincing the local farmers to adopt an environmentally sustainable agriculture.
THE PROJECT
Optimistic or pessimistic, one can t say about Patrick. "We are running towards the abyss. To die, to leave this world is normal and natural for the infinitely ephemeral creatures that each of us are. To think that this world is leaving us and that we are killing it is unbearable for me. I do not accept this impermanence. "For Patrick, the urgency today is more the rights of the soil that nourishes life than the human rights that we violate every day.
This is why Kabissa exists. To create a community of farmers who respect the environment, to share knowledge and experiences, to teach, to do research, to introduce high tech innovations such as Artificial Intelligence and robotics, these are Patrick s ambitions accompanied by a desire that they be done in an international context. "
Kabissa happens to be in China and his aim is to get people to focus on the most urgent issues. It s no longer about doing old politics by following the stale alleys of the old rigged debates. Caricaturing a bit, I d say it s about getting the great minds of this world on the dry toilet issue. "
And the old village of Lao Zhuan Di can be the place of this endeavor. Indeed, a few months ago, the houses considered dangerous and too old were emptied of their inhabitants. They received subsidies from the State in order to build new houses a few kilometers away. The old village has been abandoned and only the animals remain, which the farmers cleverly leave here in order to obtain larger financial compensations in case of buying back the buildings.
Thus, the houses could be renovated and Xiao Huang by the way settled in the village. Dunhua, a university academic biologist who has decided to change her life and convert to organic farming, is in the process of choosing the house that will house her future plan. Her scientific presence is essential to the project. And other supporters, Chinese but also of other nationalities coming from all over China, are following the project attentively and contributing in their own way, some ready to invest when the time is right.
Patrick works in parallel with local and national authorities on the validity of the project, notably by multiplying conferences. With his past as an ambassador, he is listened to with attention, especially because everyone knows that he has worked with Xi Jinping and his policy to fight against climate change is of course in everyone s mind. Patrick use this major asset to convince people that if such a center were to be created and if the farmers of this region of Yunnan were to join the effort, accompanied by the authorities, the repercussions on the local population and the politicians would be positive in every way.
However, if the Chinese are extremely sensitive to this power authority, they remain very pragmatic and ask for the proof by the facts of the feasibility of such a transformation. And for the time being, Patrick s farm is not yet profitable, and they do not yet see how to make the transition to organic farming without loss of yields or income, especially since in the farming world, and this is a universal fact, conservatism is the norm. And it is not acceptable for anyone in China at the moment to lose food self-autonomy in certain sectors and to increase the cost of agricultural goods.
THE GLOBAL CONTEXT
Chinese agriculture is mostly intensive in the traditional way. Still not very mechanized except in a few regions of great plains, modern and intensive agriculture is not widely used. Thus, physical effort close to the land has not been forgotten and manual tilling of the soil, including work animals, is still widespread, plots are small and terraces in the many mountainous regions are still cultivated. There are of course many problems that need to be urgently remedied (use of fertilizers and pesticides, immoderate use of plastic mulching) but for all the reasons mentioned above, the necessary ecological revolution may be less brutal here than in our countries where modern intensive agriculture has become the norm. Moreover, since the rural exodus is still very recent and culinary habits are almost exclusively based on fresh produce, city dwellers still practice individual vegetable farming on a massive scale, including in the most unlikely places such as balconies, rooftops, back alleys, or in a temporary way such as around construction sites, and, in fact, wherever there is available land in city.
Since the 90 s, when it was obvious to change the 30 years of environmental neglect (what the political actors themselves called "Pollute first, control later"), the concerns of the Chinese people about food quality and safety are major. For the last ten years, organic agricultural labels have multiplied, which can lead to confusion because some of them are closer to greenwashing than to real organic. However, we must mention the Chinese National Organic Products Standard, recognized as one of the most restrictive in the world. Initially intended for export, Chinese organic products are now on the domestic market and the proportion of organic crops on the territory is constantly increasing.
But there is also a relatively new and growing phenomenon that is emerging. Called the "low desire life", this movement promotes a frugal life, rejects consumerism, the norms of urban life and react against what the "modern slavery" that consist to work more and more in a world of relentless completion. Driven by social networks, it is converting more and more young city dwellers to countryside and promoting a rapidly expanding green tourism.
THE FUTURE
Will the caravanner succeed in this project of inestimable scope for the good of us all? Patrick dares to take paths that only visionaries are capable of clearing.
No one has all the solutions, not the Westerners, the Chinese or the Africans, and our future lies in a planetary cooperation. Political tensions only make the danger of extinction that threatens us more critical.
"
I refuse to be caught between fire and water. I must say it loud and clear, and urge all my contemporaries to get out of their mental rut to manage our future. It is imperative, it is a matter of survival". Kabissa is "like the fragile lotus that blooms in the mud, I must try to give this in-between space the colors of hope. It is the duty of my condition. "