La dernière année
René et Ginette vivent tout au bout de la route, un hameau qui comptait une centaine d'âmes il y a un siècle. Ginette raconte que de la ferme on entendait les enfants piailler, ça faisait comme une bordée d'oiseaux affamés.
Aujourd'hui, ils ne sont plus que trois à habiter le village, trois âmes durant l'hiver ça fait pas beaucoup de bruit. Heureusement que les chiens aboient au vent, autrement on penserait qu'aux fantômes et au silence. Quelques vacanciers reviennent dans les parages pour l'été, on les voit ouvrir grandes les fenêtres, à ce moment de l'année on a besoin des deux mains pour en compter les âmes. Et lorsque les arbres commencent à perdre leurs feuilles, que l'automne est de retour, à Saint-Saby trois doigts y suffisent, le premier pour le monsieur qui habite la maison dans le village, les deux autres pour René et Ginette.
Ils ont la soixante-dizaine passée, tordus par les rhumatismes et la vie rude d'une campagne qui n'épargne guère les travailleurs. Ils élèvent des brebis exploitant leur ferme en bio et vivant ici en autarcie et autosuffisance, respectant scrupuleusement le rythme des saisons et l'équilibre des choses, encore une année: la dernière.
The last year
René and Ginette live at the end of the road, a hamlet that counted a hundred souls a century ago. Ginette says that from the farm you could hear the children squawking, it was like a flock of hungry birds.
Today, there are only three to inhabit the village, three souls during the winter it does not make much noise. Fortunately there are dogs to bark in the wind, otherwise one might believe there are only ghosts here and silence. Some holiday-makers come back for the summer, they are seen opening their windows wide, so that at this time of year we need both hands to count the souls. But when the trees begin to lose their leaves, autumn is back, in Saint-Saby three fingers are enough, the first for the gentleman who lives in the house in the village, the other two for Rene and Ginette.
They have spent the past seventy-five years, twisted by rheumatism and the harsh life of a countryside that scarcely spares the workers, raises ewes and lives here in autarky and self-sufficiency, scrupulously respecting the rhythm of the seasons and the balance of the Things, exploiting their farm in bio and it has always been.