NOMADES DU HAUT ATLAS, CRÉPUSCULE D'UNE TRADITION
- Le 6 décembre 2023, l'UNESCO inscrit la transhumance au patrimoine culturel immatériel de l'humanité -
Au coeur des plateaux désertiques du Haut-Atlas central au Maroc, les traditions millénaires de la tribu nomade berbère des Aït Atta persistent. Plongées dans une réalité éloignée du monde moderne, ces familles nomades entreprennent deux fois par an la transhumance entre désert et montagne. Au printemps, elles abandonnent les ardeurs du soleil du Djebel Saghro pour gravir les versants frais du Haut Atlas, jusqu'au lac asséché d'Izourar. À l'issue d'une grosse semaine de transhumance, les nomades s'installent pour l'été autour du lac, où ils trouvent l'eau et la nourriture nécessaires à leurs troupeaux de chèvres et de moutons. Puis, vers septembre, lorsque les premières neiges font leur apparition, les éleveurs guident leurs bêtes vers les vastes étendues du Sud afin de fuir le froid revenu sur l'Atlas.
Depuis une dizaine d'années ce cycle ancestral tend à disparaitre et le mouvement s'avère inéluctable. Le changement climatique, à l'origine de la sécheresse persistante et de la rareté des pâturages, en est la cause principale. Parallèlement, les conditions de travail de plus en plus difficiles et la volonté croissante de la part de la jeune génération de se sédentariser en ville, entrainent la perte de raison d'être de cette tradition, et chaque année un peu plus, les nomades abandonnent ce mode de vie.
Ce reportage a été réalisé en septembre 2023 lors de la transhumance retour des troupeaux du lac d?'zourar jusqu'à la vallée du Dadès avec une famille composée de cinq personnes : Mohamed, le chef de famille, Zahra sa nièce, son fils Ahmed et sa femme Khaïra, et leur petite Fatima âgée d'à peine 3 ans.
C'est une véritable expédition, imprégnée de courage et de labeur, qui s'apprête à (re)commencer pour ce petit clan. Saïd, notre guide et ami de la famille depuis plusieurs années, nous confiera que cette transhumance sera très probablement la dernière pour eux : leur nombre réduit rend difficile la gestion optimale d'un tel périple, et les animaux peinent à trouver suffisamment de nourriture.
Loin de tout village, nous allons évoluer pendant une semaine à travers un paysage sauvage et austère, franchir des cols, suivre le cours des rivières, emprunter des oueds et traverser d'immenses plateaux d'altitude au rythme de la caravane : chèvres, moutons, dromadaires, mules, ânes et chiens... sans oublier le coq et la poule.
NOMADS OF THE HIGH ATLAS, THE TWILIGHT OF A TRADITION
In the heart of the desert plateaux of the central High Atlas in Morocco, the age-old traditions of the nomadic Berber tribe of the Aït Atta persist. Immersed in a reality far removed from the modern world, these nomadic families undertake the transhumance between the desert and the mountains twice a year. In spring, they leave behind the scorching sun of Djebel Saghro to climb the cool slopes of the High Atlas, as far as the dry lake of Izourar. After a week-long transhumance, the nomads settle down for the summer around the lake, where they find the water and food they need for their herds of goats and sheep. Then, around September, when the first snows appear, the herders lead their animals towards the vast expanses of the south to escape the cold that has returned to the Atlas mountains.
Over the last ten years or so, this ancestral cycle has tended to disappear, and the movement is proving inevitable. Climate change, which is at the root of the persistent drought and the scarcity of grazing land, is the main cause. At the same time, increasingly difficult working conditions and the growing desire of the younger generation to settle down in the cities are causing this tradition to lose its raison d'être, and every year more and more nomads abandon this way of life.
This report was shot in September 2023 during the return transhumance of the herds from Lake Izourar to the Dades Valley with a family of five: Mohamed, the head of the family, Zahra his niece, his son Ahmed and his wife Khaïra, and their little Fatima, aged just 3.
It's a real expedition, steeped in courage and hard work, that is about to (re)begin for this little clan. Saïd, our guide and friend of the family for several years, tells us that this transhumance will probably be the last for them: their small numbers make it difficult to manage such a journey, and the animals are struggling to find enough food.
Far from any village, we will spend a week travelling through a wild and austere landscape, crossing passes, following the course of rivers, following wadis and crossing immense high plateaux at the pace of the caravan: goats, sheep, camels, mules, donkeys and dogs.... not forgetting the cock and the hen.
On 6 December 2023, UNESCO inscribes transhumance as an intangible cultural heritage of humanity