Restructuration urbaine
Voiron, petite ville de 20 000 habitants de l'Isère, a choisi de restructurer 2 quartiers populaires en s'inscrivant dans la politique de démolitions et reconstructions gérée par l'Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU). 3 tours de au total 120 logements seront détruites et remplacées par des constructions de logements et commerces. Les programmes seront mixtes et comprendront des logements sociaux et de l'accès à la propriété. Seulement 1/3 des logements détruits seront reconstruits sur place, il faudra donc reloger 80 familles, parfois dans le même quartier, parfois très loin de l'endroit où elles ont construit toute leur vie.
Ces territoires sont donc mis à l'épreuve par ce nouveau visage des opérations de rénovation urbaine. Leur fragile équilibre socio-spatial est mis en danger par des modalités de relogement qui doivent prendre en compte quantité de formes de perceptions de l'entre-soi que constitue l'habitat et les trajectoires individuelles et collectives à l'origine du lien social constitué. Certaines familles peuvent ne pas sortir à l'identique des procédures de relogement qui conduisent souvent à des décohabitations (les enfants en âge de prendre un appartement sont fortement incités à s'émanciper de leurs parents), ce qui induit une paupérisation du groupe familial en augmentant la charge locative globale et en déconstruisant les rapports familiaux hiérarchiques originels.
Pourtant, loin de la doxa isolationniste du « désert social « ou des « quartiers sensibles » qui seraient à part des évolutions du reste de la société, les grands ensembles sont un tissu vivant de solidarités et d'entraides, de conflits quant à l'usage des lieux mais aussi de sociabilités diverses et nombreuses.
Le lieu d'habitation joue un rôle stratégique dans l'économie des pratiques et des ressources des milieux populaires, et reste un des rares espaces où les ménages peuvent exercer leur « pouvoir d'exclusion » et bénéficier d'une forme d'entre-soi. L'épreuve imposée de la restructuration urbaine vient percuter profondément cet équilibre en individualisant et en faisant diverger les trajectoires sociales.
Urban Restructuring
Voiron, a small town of 20,000 inhabitants in Isère, France, has chosen to restructure two working-class neighborhoods as part of the demolition and reconstruction policy managed by the National Agency for Urban Renewal (ANRU). 3 towers with a total of 120 housing units will be destroyed and replaced by housing and commercial buildings. The programs will be mixed and will include social housing and home ownership. Only 1/3 of the destroyed houses will be rebuilt on site, so 80 families will have to be relocated, sometimes in the same neighborhood, sometimes very far from where they have built all their lives.
These territories are therefore being put to the test by this new face of urban renewal operations. Their fragile socio-spatial equilibrium is endangered by re-housing methods that must take into account many forms of perception of the self that constitutes the habitat and the individual and collective trajectories at the origin of the social link that has been formed. Some families may not emerge identically from re-housing procedures that often lead to decohabitation (children of apartment age are strongly encouraged to emancipate themselves from their parents), which leads to an impoverishment of the family group by increasing the overall rental burden and deconstructing the original hierarchical family relationships.
However, far from the isolationist doxa of the "social desert" or the "sensitive neighborhoods" that would be separate from the developments in the rest of society, large housing estates are a living fabric of solidarity and mutual aid, of conflicts over the use of the premises, but also of diverse and numerous sociabilities.
The place where people live plays a strategic role in the economy of practices and resources of the working classes, and remains one of the rare spaces where households can exercise their "power of exclusion" and benefit from a form of self-determination. The ordeal imposed by urban restructuring has had a profound impact on this balance by individualizing and diverging social trajectories.