Débardage à cheval
C est pas mal comme bureau, non ? Sourire au coin des lèvres, casque de protection vissé sur la tête, Denis Ferry ne boude pas son plaisir. Aux alentours, ni bâtiment, ni open-space, ni ordinateur. Son lieu de travail? Une forêt nichée à l orée de la commune de Bathelémont, en Meurthe-et-Moselle, à une heure de route de Saint-Dié. Depuis le début de cette matinée de mai, Denis tronçonne certains arbres qui empêchent d autres de se développer, puis les extraits en lisière de forêt.
Un travail de débardage classique. A un détail près. Le Vosgien de 40 ans ne déplace pas le bois avec un engin mécanique, mais grâce à Calypso, massif cheval de 800 kg. A droite, à gauche, recul... Denis multiplie les indications à sa partenaire, qui traîne 300 kg de bois grâce à un collier de traction harnaché à son cou. La mission nécessite dialogue et précision. Certains troncs coupés mesurent plus de 10 mètres. Pour les sortir de la forêt, il faut slalomer entre les arbres, ronces et souches mortes. La relation avec Calypso est primordiale. J ai mis plusieurs semaines avant que ça se passe bien. Je dois lui laisser de l autonomie, mais pas trop quand même, précise Denis.
Si on n est pas passionné, on ne tient pas.
Le duo s est formé il y a cinq ans. Lassé de travailler en intérieur, Denis quitte son métier de pâtissier. Il fonde son entreprise de débardage à cheval, après avoir suivi une formation dédiée à Saint-Dié. Une évidence pour ce Vosgien qui a grandi en se baladant et entretenant la forêt appartenant à son père. La relation avec Calypso s est renforcée au fil des mois. On se connaît bien maintenant, c'est ma collègue, plaisante t-il. J arrive à voir quand elle en a marre, où elle est énervée.
Denis travaille en moyenne 6 heures par jour. Il adapte ses journées de travail selon l état de fatigue de Calypso. S il raconte son métier avec passion et détails, il n en oublie pas les difficultés. Des frayeurs lorsque les arbres coupés le frôlent ou les rudesses d un job à la merci des conditions climatiques. Lorsqu il pleut toute la journée ou qu au contraire, il fait très chaud, c est compliqué, admet-il. A la fin d une journée comme celle-ci, j ai marché plus de 10 km. Si on n est pas passionné, on ne tient pas.
Débarder à cheval : un intérêt écologique
Aujourd hui, le débardage n est qu une part minoritaire de son activité, complétée par du bûcheronnage et de travaux sylvicoles. Récemment, il a oeuvré sur des sites archéologiques ou historiques comme le camp celtique de la Bure à Saint-Dié ou le Parc à dirigeables de la Louvroie.
A Bathelémont, Denis et Calypso vont collaborer pendant une quinzaine de jours pour débarder plusieurs zones. Pour l office national des forêts, des communes ou des particuliers, l'intérêt de faire appel à un débardeur à cheval est double. L animal se faufile dans des zones où le tracteur bute. Mais l avantage est surtout écologique. Une fois le travail achevé, le cheval ne laisse aucune signature de son passage dans la nature. Au contraire, un engin mécanique consomme du gazole, dégrade des sols fragiles et peut, lors de ses manoeuvres, frotter les arbres, ce qui est parfois source de maladies.
Malgré tout, rares sont les clients à privilégier cette solution naturelle, mais plus coûteuse. Cela n'empêche pas Denis de garder le sourire. Il y a cinq ans, il était tous les matins en cuisine pour préparer des dizaines de pâtisseries. Aujourd hui, il navigue de forêt en forêt au rythme des projets. Et il semble confortablement installé dans son nouveau bureau.
Texte : Clément Le Foll
Skidding on horseback
"It's not a bad office, is it?" Smiling at the corner of his lips, protective helmet screwed on his head, Denis Ferry does not sulk his pleasure. There is no building, no open space, no computer. His workplace? A forest nestled on the edge of the town of Bathelémont, in Meurthe-et-Moselle, an hour's drive from Saint-Dié. Since the beginning of this May morning, Denis has been cutting down some trees that prevent others from growing, then extracting them from the edge of the forest.
A classic skidding job. Except for one detail. The 40 year old Vosgian does not move the wood with a mechanical machine, but with Calypso, a massive 800 kg horse. "To the right", to the left, "backward"... Denis multiplies the indications to his partner, who drags 300 kg of wood thanks to a traction collar harnessed to her neck. The mission requires dialogue and precision. Some cut trunks are more than 10 meters long. To get them out of the forest, you have to slalom between trees, brambles and dead stumps. "The relationship with Calypso is essential. It took me several weeks to get it right. I have to give her some autonomy, but not too much," says Denis.
"If you're not passionate about it, you can't keep it up.
The duo formed five years ago. Tired of working indoors, Denis left his job as a pastry chef. He founded his own horse-drawn logging company, after having followed a dedicated training course in Saint-Dié. It was an obvious choice for this Vosgian who grew up walking and maintaining the forest owned by his father. The relationship with Calypso has grown stronger over the months. We know each other well now, she's my colleague," he jokes. I can tell when she's fed up, when she's upset."
Denis works an average of six hours a day. He adapts his work days according to Calypso's state of fatigue. If he tells his job with passion and details, he does not forget the difficulties. Fears when the cut trees brush against him or the harshness of a job at the mercy of the weather. "When it rains all day or when it is very hot, it is complicated, he admits. At the end of a day like this, I walked more than 10 km. If you're not passionate about it, you don't last."
Logging on horseback: an ecological interest
Today, logging is only a minority part of his activity, supplemented by logging and silvicultural work. Recently, he has worked on archaeological or historical sites such as the Celtic camp of La Bure in Saint-Dié or the Louvroie airship park.
In Bathelémont, Denis and Calypso will work together for two weeks to clear several areas. For the National Forestry Office, municipalities or private individuals, the interest of using a horse skidder is twofold. The animal gets into areas where the tractor stumbles. But the advantage is especially ecological. Once the work is done, the horse leaves no signature of its passage in nature. On the contrary, a mechanical machine consumes diesel, degrades fragile soils and can, during its maneuvers, rub the trees, which is sometimes a source of diseases.
Despite this, few customers prefer this natural but more expensive solution. This does not prevent Denis from keeping a smile on his face. Five years ago, he was in the kitchen every morning preparing dozens of pastries. Today, he sails from forest to forest at the pace of his projects. And he seems comfortable in his new office.
Text: Clément Le Foll