Fermer les yeux
Fermer les yeux, c'est voir encore.
« L'endroit le plus obscur est sous la lampe » proverbe chinois
Noir et Lumière. Apparition et disparition d'images qui relèvent à la fois du réel et de l'imaginaire.
Ce travail a été réalisé avec un groupe de femmes malvoyantes d'environ 40 à 80 ans.
Je leur ai installé un périmètre de perception tactile et j'y ai ajouté une ampoule nue. Suspendue en bout de fil. à hauteur de tête. Mobile.
En règle générale, je me suis efforcée d'intervenir le moins possible pour laisser advenir la créativité. Au plaisir de chercher et construire ensemble, un sentiment de liberté c'est agrégé, devant lequel ont fini par céder, chemin faisant, un certain nombre de conventions sociales. Au point que c'est exprimé le désir, d'abord, de « faire peau neuve ». Puis le désir de faire « peau nue ».
J'observe alors qu'être privé de la capacité de voir peut susciter des images inédites. Est-ce que les images sont en nous ? "Qu'est ce qu'est "voir"? Est-ce nos yeux qui voient ?
A partir de tout le matériel accumulé, images et enregistrements sonores des entretiens, j'ai procédé à un travail personnel en m'inspirant de la conception de la "vision" que ces femmes ont partagée avec moi, (vous, vous voyez tout en bloc, mais nous non. La "vision" tactile ou les résidus d'une vision oculaire, sont tout autre. Fragments par fragment, c'est un puzzle qui se reconstitue dans la tête. Voir, c'est aussi ce qu'on sait. C'est aussi ce qu'on ressent.
Le vocabulaire enrichi de leur vision. Je vois le mouvement des arbres dans le vent ce matin ; je vois les pas sur l'asphalte. Je vois ! Est-ce aussi une façon d'exorciser une peur ? La perte de la vue, la peur de l'obscurité ? Qu'est ce qui continue d'exister une fois la lumière éteinte ? Est-ce que tu existes encore si je ferme les yeux ?
Ce n'est que quand la malvoyance est intégrée comme faisant partie de soi, comme une difficulté à vaincre mais qui n'est pas insurmontable, que la vie reprend totalement. Qu'on peut de nouveau se "voir" comme une personne à part entière.
Fermer les yeux
To close your eyes is to see again.
"The darkest place is under the lamp" Chinese proverb
Darkness and Light. Appearance and disappearance of images that are both real and imaginary.
This work was done with a group of visually impaired women in their 40s to 80s.
I installed them a perimeter of tactile perception and I added a bare lightbulb. Suspended by the wire. At head height. Mobile.
In general, I tried to intervene as little as possible to let creativity happen. In the pleasure of seeking and building together, a feeling of freedom has emerged, before which, along the way, a number of social conventions have given in. To the point that the desire was expressed, first of all, for a "makeover". Then the desire to be "bare skin".
I observe, then, that being deprived of the ability to see can elicit new images.
Are the images in us? "What is 'seeing'? Is it our eyes that make us see?
From all the accumulated material, images and sound recordings of the interviews, I proceeded to a personal work of diving into each image.
Inspired by the conception of "vision" that these women shared with me, (you, you see everything as a whole, but we don't. Tactile "vision" or the residues of an ocular vision, are quite different. Fragment by fragment, it's a puzzle that is reconstructed in the head. Seeing is also what we know. It is also what we feel.
The vocabulary enriched by their vision. I see the movement of trees in the wind this morning; I see the footsteps on the asphalt... I see! Is it also a way to exorcise a fear? Loss of sight, fear of the dark? What continues to exist after the light is turned off? Do you still exist if I close my eyes?
It is only when low vision is integrated as part of oneself, as a difficulty to be overcome but which is not insurmountable, that life begins again completely. That we can once again "see" ourselves as a whole person.