Pour accéder à la série en entier, vous devez vous logger ou demander un compte Hans Lucas en cliquant ici.
Hommage aux morts de la rue
"535 mots pour 535 morts".
Le collectif Les Morts de la Rue organisait un hommage aux personnes sans domicile décédées durant l'année passée en France, dans le parc des Buttes-Chaumont. Un pot de fleur a été déposé en mémoire de chaque personne sans domicile décédée durant l'année et recensée par le collectif (probablement bien en-dessous de la réalité), disposés pour composer un parcours hommage autour du lac des Buttes-Chaumont.
Le parcours est chronologique, afin de permettre à des proches de trouver plus rapidement le nom de la personne et de venir se recueillir, m'explique Bérangère Grisoni, présidente du collectif. Les bénévoles, positionnés tout au long de ce parcours, lisent les noms des personnes lorsqu'ils étaient connus, avec l'âge et le lieu du décès, et évoquent des extraits de leurs vies lorsqu'ils en ont connaissance pour sensibiliser les passants et les inviter à se joindre à ce dernier hommage. Deux danseuses effectuent une chorégraphie tout au long du parcours, en interpellant joggeurs et promeneurs pour les faire réagir. A l'entrée du parc, des banderoles avec les listes des victimes sont affichées, accompagnées de citations, et des bénévoles distribuent des roses à celles et ceux qui le souhaitent pour les accrocher sur les grilles à proximité.
Vincens Hubac, pasteur bénévole au collectif les Morts de la Rue, est responsable des cérémonies d'inhumation pour les gens isolés dont personne ne réclame le corps. "Laïques évidemment, sauf quand la personne était protestante". Il explique l'importance de ces cérémonies pour pouvoir redonner un nom et une dignité dans la mort à ces personnes, et donner à leurs entourages la possibilité de se réunir lors de vraies obsèques. La Ville de Paris prend en charge les frais d'inhumation, le cercueil (qui est "vraiment très correct", confie Vincens) et le paiement de la concession pour 5 ans.
Danièle, une autre bénévole, tient le stand sur lequel sont placés des autocollants "Vivre à la rue tue !", des numéros du journal La Croix du même jour contenant la liste des défunts, et des carnets faire-part "535 morts de la rue, à 49 ans en moyenne" distribués aux passants. Elle est très inquiète de l'augmentation de la précarité, qu'elle constate le matin dans le quartier de Beaubourg où elle distribue avec des membres de sa paroisse une soixante de cafés à des personnes sans domicile. "Pour la plupart très propres et bien habillés, on ne devinerait jamais qu'ils sont à la rue." Elle dénonce le manque de moyens mis en place pour limiter et prendre en charge les dégâts psychologiques occasionnés par la vie sans domicile, qui ravagent les personnes concernées et bloquent souvent la réinsertion. "La rue tue, oui. Mais elle rend fou avant de tuer."
Le collectif les Morts de la Rue, créé en 2002, regroupe une cinquantaine d'associations proches des personnes sans abri.
Paris, mardi 30 mars 2021.
Tribute to the dead of the street
"535 words for 535 deaths".
The collective Les Morts de la Rue organized a tribute to the homeless people who died during the past year in France, in the Buttes-Chaumont park. A flowerpot was placed in memory of each homeless person who died during the year and counted by the collective (probably well under the reality), arranged to compose a tribute route around the lake of Buttes-Chaumont.
The route is chronological, in order to allow relatives to find the name of the person more quickly and to come and pay their respects, explains Bérangère Grisoni, president of the collective. The volunteers, positioned along the route, read the names of the persons when they were known, with the age and place of death, and evoke extracts of their lives when they know them to sensitize the passers-by and invite them to join this last tribute. Two dancers perform a choreography all along the route, calling out to joggers and walkers to make them react. At the entrance to the park, banners with lists of the victims are displayed, accompanied by quotes, and volunteers distribute roses to those who wish to hang them on the nearby railings.
Vincens Hubac, a volunteer pastor with the Morts de la Rue collective, is in charge of the burial ceremonies for isolated people whose bodies are not claimed by anyone. "Secular of course, except when the person was Protestant". He explains the importance of these ceremonies to be able to give a name and dignity in death to these people, and to give their relatives the possibility to meet during a real funeral. The City of Paris pays the burial expenses, the coffin (which is "really very correct", confides Vincens) and the payment of the concession for 5 years.
Danièle, another volunteer, runs the stand on which are placed stickers "Living on the street kills!", issues of the newspaper La Croix of the same day containing the list of the deceased, and booklets announcing "535 deaths on the street, at an average age of 49" distributed to passers-by. She is very concerned about the increase in precariousness, which she sees in the morning in the Beaubourg district where she and members of her parish distribute sixty coffees to homeless people. "For the most part very clean and well dressed, you would never guess that they are homeless." She decries the lack of resources put in place to limit and address the psychological damage caused by homelessness, which ravages the people involved and often blocks reintegration. "The street kills, yes. But it makes you crazy before it kills."
The collective Les Morts de la Rue, created in 2002, brings together some fifty associations close to homeless people.
Paris, Tuesday, March 30, 2021.