Les oubliés du confinement, Mineurs en danger
Pendant ce deuxième confinement, le dispositif d'évaluation des mineurs isolés étrangers (DEMIE) géré par la Croix-Rouge française, continue de mettre à la rue de nombreux jeunes qui reçoivent une notification de refus de prise en charge.
L'association Utopia 56 maraude tous les après-midis devant le DEMIE pour informer les mineurs isolés déboutés de leur droit au recours contre la décision de la Croix-Rouge de ne pas reconnaitre la minorité des jeunes, mais également pour leur donner des tentes et des couvertures pour la nuit.
« Quand je suis arrivé à Couronne, j'ai fait mon évaluation et ils ne m'ont pas reconnu mineur. Donc j'ai fait plein de jours dehors, je dormais sous la tente à Rosa Parks. On m'a expliqué qu'il y avait un endroit pour les jeunes où on pouvait manger, organisé par l'association les Midis du Mie. Je suis venu au déjeuner, j'étais vraiment très sale. Les bénévoles m'ont vu avec mes amis, et ils nous ont trouvé un hébergement d'urgence. Ça fait presque deux semaines que nous sommes à l'hôtel grâce à eux et du jeudi au dimanche, on vient déjeuner au jardin. Je suis en train de faire mon recours et c'est difficile, mais les associations comme Médecins Sans Frontières et Les Midis du Mie s'occupent de nous.» Alpha, 16 ans.
En ce mois de septembre 2020, la pluie s'abat tous les jours sur la région parisienne et les jeunes qui dorment au campement du quartier de Rosa Parks, sont épuisés. « Utopia 56 nous a donné des tentes et après on est parti dormir quelques jours près du canal, dans la rue. Mais la police nous a enlevé les tentes et ils nous ont chassés de là-bas » explique dans sa chambre d'hôtel, Moustapha, guinéen de 16 ans, non pris en charge par la Croix-Rouge. Agathe Nadimi, fondatrice des Midis du Mie se souvient : « Les jeunes arrivaient trempés au déjeuner de l?association. Ils étaient épuisés, sans rien. On a décidé de mettre quatre jeunes en urgence à l'hôtel. Le lendemain, trois autres?». Finalement, à la mi-septembre, l'association hébergeait dix jeunes à l?hôtel et n?étant pas encore en période hivernale, les bénévoles se demandaient comment allait se passer l'hiver. Le 30 octobre 2020, un nouveau confinement commencemais contrairement à celui du printemps, le dispositif de la Croix-Rouge continue à mettre en cause la minorité des jeunes et les renvoie à la rue. Aucun hébergement n'est prévu pour eux dans cette crise sanitaire. Pour l'association des Midis du Mie, la seule solution envisageable, pour leur porter secours, est de rouvrir un hébergement collectif pour une quinzaine de jeunes.
Le 29 septembre 2020, Agathe donne rendez-vous aux dix jeunes de l'hôtel et à six autres qui dorment dans la rue, pour aller dans un théâtre solidaire de Seine-Saint-Denis. La loge est transformée en espace de vie par les bénévoles, qui en plus d?assurer une permanence 24h/24, se chargent de trouver à manger tous les soirs. Dans le même temps, l'association continue de chercher une solution pour ne pas remettre les jeunes à la rue dans quelques jours, puisqu' ils ne peuvent rester dans ce local que jusqu'au 3 novembre.
Le Nouveau Théâtre de Montreuil répondra favorablement aux nombreux mails envoyés et ce nouveau lieu permettra de poursuivre la mise à l'abri d'une quinzaine de jeunes jusqu'au 1er décembre 2020. Avec l'aide des bénévoles des Midis du Mie et des artistes résidents du théâtre, des activités sont mises en place: atelier guitare, cours de français et de mathématiques, initiation au piano et au théâtre, séances de sport.Mais de nouveaux mineurs non accompagnés, déboutés, continuent à se présenter à l'association. Elle relance alors un plan d'hébergement d'urgence à l'hôtel pour douze jeunes et loge une dizaine d'autres chez des personnes solidaires. Les Midis du Mie fournissent aux jeunes de l'hôtel des petits déjeuners, des téléphones et du crédit wifi pour qu'ils ne soient pas encore plus isolés en cette période de confinement.
Aujourd'hui il n'existe aucun lieu d'hébergement prévu par l'État pour ces mineurs pendant la période d'examen de leur dossier par un juge pour enfants, malgré le cri d'alarme des associations qui ne cessent d'alerter sur la vulnérabilité de ces jeunes abandonnés.
« On peut pas expliquer comment c'est être dans la rue, c'est vraiment difficile, étant mineur dehors, c'est vraiment incroyable. Mais on n'a pas le choix, on est obligé, c'est la vie qui nous réserve tout ça. Avec le temps on espère que ça va aller mieux. On a des amis dehors aussi, on pense à eux. On ne souhaite à personne d'être à la rue. Tout le monde doit avoir un abri et vivre pour avoir une situation. On espère aussi que les choses puissent s'accélérer au niveau de la justice, parce que le recours prend beaucoup de temps. Si personne ne t'aide pour être logé, comment tu vas faire ? On a tous des rêves, même si on est très jeune, on est venu ici pour avoir un meilleur avenir que ce qu'on vivait avant. Pendant les évaluations, tu leur expliques ton histoire mais ils prennent ça à la légère. Tu as risqué ta vie jusqu'ici, tu as besoin d'aide, d'être accueilli. » Moustapha, 16 ans.
L'association les Midis du Mie demande une prise en charge d'urgence pour ces jeunes à la Mairie de Paris et au conseil départemental de Seine-Saint-Denis.
The forgotten in confinement, Minors in danger
During this second confinement, the assessment system for unaccompanied foreign minors (DEMIE) managed by the French Red Cross continues to put on the streets many young people who receive a notification of refusal of care. ?When I got to Couronne, I did my assessment and they didn't recognize me as a minor. So I did a lot of days outside, I slept in a tent at Rosa Parks. They explained to me that there was a place for young people where we could eat, organized by the association Les Midis du Mie. I came for lunch, I was really very dirty. The volunteers saw me with my friends, and they found us emergency accommodation. We have been at the hotel for almost two weeks thanks to them and from Thursday to Sunday, we come to have lunch in the garden. I am making my appeal and it is difficult, but associations like Médecins Sans Frontières and Les Midis du Mie are taking care of us. " Alpha, 16 years old. In this month of September 2020, the rain is falling every day in the Paris region and the young people who sleep in the camp in the Rosa Parks district are exhausted. ?Utopia 56 gave us tents and after that we went to sleep for a few days near the canal, in the street. But the police took the tents away from us and they chased us out of there, ?explains in his hotel room, Moustapha, a 16-year-old Guinean, not supported by the Red Cross. Agathe Nadimi, founder of Midis du Mie remembers: ?The young people arrived soaked at the association's lunch. They were exhausted, with nothing. We decided to put four young people in emergency at the hotel. The next day, three more.? ?. Finally, in mid-September, the association was hosting ten young people at the hotel and not being in the winter yet, the volunteers were wondering how the winter was going to be. On October 30, 2020, a new confinement began, but unlike that of the spring, the Red Cross device continues to question the minority of young people and sends them back to the streets. No accommodation is planned for them in this health crisis. For the Midis du Mie association, the only possible solution to help them is to reopen collective accommodation for around fifteen young people. On September 29, 2020, Agathe makes an appointment with ten young people from the hotel and six others who sleep in the street, to go to a solidarity theater in Seine-Saint-Denis. The lodge is transformed into a living space by the volunteers, who in addition to being on duty 24 hours a day, are responsible for finding food every evening. At the same time, the association continues to look for a solution so as not to put the young people back on the streets in a few days, since they can only stay in this room until November 3. Another theater in Seine-Saint-Denis will respond favorably to the many emails sent and this new place will allow the sheltering of around fifteen young people to continue until December 1, 2020. With the help of the Midis du Mie volunteers and the resident artists of the theater, activities are set up: guitar workshop, French and mathematics lessons, piano and theater lessons, sports sessions. But new minors not accompanied, rejected, continue to present themselves to the association. She then relaunched an emergency accommodation plan at the hotel for 12 young people and housed a dozen others with supportive people. Les Midis du Mie provides young people at the hotel with breakfasts, telephones and wifi credit so that they are not even more isolated during this period of confinement. Today there is no accommodation provided by the State for these minors during the period of examination of their case by a juvenile judge, despite the cry of alarm from the associations which constantly alert on the vulnerability of these abandoned young people. ?You can't explain what it's like to be in the street, it's really difficult, being a minor outside, it's really incredible. But we have no choice, we have to, it's life that has all that in store for us. Over time we hope things will get better. We have friends outside too, we think of them. We don't want anyone to be homeless. Everyone has to have shelter and live to have a situation. We also hope that things can speed up in terms of justice, because the appeal takes a long time. If no one is helping you find accommodation, what are you going to do? We all have dreams, even if we are very young, we came here to have a better future than what we lived before. During the assessments, you explain your story to them, but they take it lightly. You risked your life so far, you need help, to be welcomed. »Moustapha, 16 years old. The association Les Midis du Mie is asking for emergency care for these young people from the Paris City Hall and the Seine-Saint-Denis departmental council.