Zones imaginaires, France, 2023
La maladie mentale m'iintriguait. Les préjugés qui l'accompagnaient depuis des années, notamment ceux que j'avais pu entendre, m'ont poussé à ouvrir les portes d'un "asile". Je souhaitais passer du temps auprès de patients et de soignants, afin d'éclaircir de nombreux questionnements personnels. Je me suis rendu au Centre hospitalier Buech Durance de Laragne, afin de travailler auprès des patients de psychiatrie, de géronto-psychiatrie, ainsi que de certains patients d'Ehpad et d'addictologie...
J'y ai déambulé, passé de riches moments à discuter avec les habitants de l'hôpital et essayé de ressentir le plus profondément possible, l'énergie qui se dégageait de ces lieux. J'ai partage? ces instants de la vie quotidienne imprégnés de l'atmosphère médicale, ai assisté à différents types d'ateliers, y ai proposé des temps de rencontre, d'échange et de co- création. En dehors des ateliers de transmission et de création formelle, je naviguais à la "Cafet", un espace de sociothérapie où les patients de toutes les unités de l'hôpital peuvent se croiser, partager un temps s'ils le souhaitent, ou bien entreprendre une plongée solitaire dans leurs univers singuliers. Mon objectif final a été de retranscrire, à travers images et mots, les maintes sensations et émotions qui m'ont parcouru pendant ces semaines d'immersion.
Mon approche photographique tente ainsi de nous faire voyager dans ces "Zones" aux réalités multiples où le réel se confronte perpétuellement à la fiction. La plus grande difficulté de ce travail était de montrer l'invisible, c'est pour cela que j'ai fait le choix de passer par des citations, des mots, que certains d'entre eux m'ont confié, et des pensées qui m'ont traversé lors de ce séjour à l'inégalable intensité. Je me suis beaucoup appuyé sur l'importance du lien avec la nature qui est offert par le cadre de l'hôpital, dont l'architecture et l'environnement ont, en eux, une aura très singulie?re, et j'ai pu de ce fait constaté, que la particularité de cette structure donnait aux patients une certaine liberté de déambulation au sein de ses différents espaces.
Le vocabulaire psychiatrique est très complexe, les utilisations courantes de tout ce lexique rattaché à la maladie mentale, ne sont que trop rarement bien utilisé. La subtilité de tous ces savoirs psychiatriques, m'a conduit à faire le choix de n'avoir aucun à priori sur les êtres que je côtoyais. Je ne savais rien d'eux hormis qu'ils étaient là. Certaines choses se devinent, certaines fois, les gens les expriment, et d'autres fois un flou règne et cela ne pose aucun problème car heureusement pour eux, je n'appartiens pas au corps médical.
La majorité des patients en crise psychique ne peuvent pas être reconnus, d'autres ne le souhaitent tout simplement pas. J'ai donc travaillé autour de la suggestion et de la fragmentation des corps et des esprits, dans divers espaces. J'ai surtout tenté de comprendre les subtilités des regards, des langages, des gestes et des bruits qui se diffusaient dans l'air. Tous les sens en alerte, je rencontrais et parcourais ces mondes inconnus et multiples qui m'étaient offerts.
"Les soignants n'ont plus le temps.", cette phrase tant attendue peut sembler tragique car le "temps" est l'élément le plus important dans le soin et la relation aux patients. Il permet de créer des liens, de libérer les paroles, les regards ainsi que d'atténuer les appréhensions face à l'etrange et a l'étranger. J'étais cet étranger, qui souhaitait découvrir tous ces univers inte?rieurs et y ai passé un temps court mais riche. Une expérience que je désire renouveler.
Mon objectif final ne serait-il pas, de simplement faire des images qui leur feront du bien ?
Imaginary zones
Mental illness intrigued me. The prejudices that had accompanied it for years, particularly those I had heard, prompted me to open the doors of an "asylum". I wanted to spend some time with patients and carers, to clarify a number of personal questions. I went to the Centre Hospitalier Buech Durance in Laragne, to work with psychiatric and geriatric psychiatric patients, as well as with a number of Ehpad and addictology patients...
I wandered around the hospital, spending a lot of time chatting with its "inhabitants" and trying to feel as deeply as possible the energy that emanated from these places. I shared these moments of daily life steeped in the medical atmosphere, attended different types of workshops, and proposed times of encounter, exchange and co-creation. In addition to the transmission and formal creation workshops, I navigated the "Cafét", a social therapy space where patients from all the hospital's units can meet up, share a moment if they wish, or take a solitary plunge into their singular universes. My final aim was to transcribe, through images and words, the many sensations and emotions I experienced during these weeks of immersion.
My photographic approach thus attempts to take us on a journey through these "Zones" of multiple realities, where reality perpetually confronts fiction. The most serious